« Tu es trop gros ! » dit-il en passant sa main sur l’encolure d’un noir de jais de l’étalon qui avait redressé l’encolure. La vie de Tornado n’était plus la même. A l’époque ou son cavalier défendait la Californie, lui vivait le plus clair de son temps en box, bien loin des prairies verdoyantes de l’île de Baiaime. Alejandro ne pouvait se permettre qu’on ne reconnaisse son étalon noir, ce qui l’obligeait à le cacher la plupart du temps. Aujourd’hui, tout cela était derrière eux et Tornado vivait sa meilleure vie. Il vivait en prairie avec deux juments qui mettraient bas l’année prochaine de deux poulains espagnols. Alejandro ne vivait plus dans une hacienda, mais dans une maison moderne qu’il appréciait. Il avait retrouvé sa femme et était devenu papa, bientôt ils accueilleraient même un nouveau membre dans la famille. Elena était enceinte et bientôt ils ne seraient plus trois, mais 4, ce qui était un bon chiffre. Alejandro avait passé sa vie à se battre que ce soit pour la Californie ou pour sa simple survie, maintenant il avait juste envie de profiter de sa vie, de la femme qu’il aimait et de ses enfants.

Cette ville, ce pays n’avait pas autant besoin de lui que la Californie. Ici, Zorro était un personnage vieillissant. Beaucoup d’héros étaient présents et Alejandro sentait bien qu’il n’était plus trop de la partie. Ce n’était pas facile à digérer, parce que dans son monde, il était bien l’un des seuls à faire front, il était unique en son genre et le peuple scandait son nom. Ici, il y avait temps de héros sur l’île que Zorro en était un parmi d’autres et il faisait plus d’offices de justiciers masqués démodé que de véritable héros… C’était comme ça, les choses changent, mais Alejandro aurait surement préféré que le changement soit moins brutal.

« Allez viens mon vieux, faut qu’on se garde en forme quand même… »  Il enfila son licol à Tornado et prit la direction des écuries. Après un bon pansage, Alejandro sella son étalon et enfila son costume de lumière. Cela ne servirait surement à rien, mais peut-être qu’il trouverait quelqu’un à aider ou un écureuil en détresse. Elena était partie avec Joaquim chez une de ses amies, lui avait dû s’occuper de terminer de clôturer pour une nouvelle prairie. Il était tranquille pour le reste de l’après midi et avait donc décidé de découvrir les chemins qu’il n’avait pas encore eu le temps d’explorer. Tornado s’élança d’un pas vif, il était visiblement très heureux de sortir, il adorait ça autant que son cavalier, mais dernièrement Alejandro n’avait pas vraiment eu le temps de s’en occuper comme il avait l’habitude de le faire.

Après deux heures de balades, Alejandro se dirigea vers la ville, il avait faim et pénétra dans la banlieue Ouest pour prendre une glace, tandis que Tornado se faisait admirer de toute part. Si Zorro n’était plus vraiment à l’ordre du jour pour sauver l’humanité, il était toujours autant aimé par les enfants qui n’arrêtaient pas de lui lancer des regards émerveillés. Comme quoi, il n’était pas si ringard que ça. Alejandro ne met pas longtemps avant de se mettre à déguster sa glace, il a mis pied à terre et se bagarre avec Tornado qui est visiblement bien décidé à lui piquer son petit plaisir sucré. « Tu te souviens de ce que t’as dit le vétérinaire, pas le droit aux trucs sucrés. » Il farfouille dans sa poche avant de sortir un bonbon à la luzerne garanti sans sucre, parfait pour les chevaux. L’étalon ne met pas longtemps avant d’attraper ce qui se trouve dans la main de son cavalier, visiblement aussi gourmand que l’homme à ses côtés.

Une voix interpelle Alejandro et celui-ci redresse la tête pour poser son regard sur un homme vêtu de noir. Il voit presque double, mais leurs tenues sont tout de même légèrement différentes. « On dirait bien… » laisse t’il échapper quelque peu surpris par cette rencontre impromptue. « Même si vous n’êtes pas le premier que je croise… » Il avait eu un maitre, Don Diego, le père d’Elena qu’il avait toujours énormément respecté. « Mais vous êtes le premier que je croise sur cette île. » dit-il tout en caressant le chanfrein de son étalon noir qui adorait depuis toujours les petites attentions de son cavalier.

@Diego de la Vega

Il n’était pas le seul Zorro du coin…Super, lui qui pensait être unique. Il s’était mis le doigt dans l’œil… Pourtant il était assez de curieux de découvrir qui était cet homme. Un lui plus jeune ou plus vieux ? Non ils ne se ressemblaient pas, un jeune Diego peut être ? Ou une autre version de son maitre. Il n’aurait su le dire… Il n’avait croisé qu’une fois Zorro quand il était enfant. Quand il avait rencontré de nouveau, il était beaucoup plus âgé, bien moins que cet homme. Il ne le voyait pas vraiment, parce que comme lui il était masqué, mais il pouvait quand même voir qu’il n’était pas si âgé ça. En fait ils devaient avoir un âge similaire. Soudain la lumière s’alluma dans l’esprit d’Alejandro. C’est vrai qu’Elena lui avait parlé de sa rencontre avec un variant de son père. Un homme qu’elle avait rencontré sans le lui dire, et bien évidemment il n’avait pas vraiment apprécié qu’elle ne lui dise pas avant. C’était stupide, il le savait, car Elena était libre de faire ce qu’elle voulait sans le lui dire, mais il était jaloux et souvent il avait du mal à gérer sa jalousie. Tornado redressa la tête et pointa ses jolies petites oreilles noires pour observer le cheval qui arrivait dans sa direction. Il était un peu plus grand que l’autre, mais il se ressemblait également. Tendrement, il lui flatta l’encolure pour le rassurer. « T’inquiète mon vieux c’est toi le plus beau ! » Il parlait souvent à son cheval, peut-être un peu trop, mais il s’en moquait, il aimait ses conversations silencieuses avec son étalon espagnol d’un noir de jais.

Il en avait peut-être trop dit, mais Alejandro n’y allait jamais par quatre chemins, il était direct, même si cela énervait souvent son maitre qui lui avait appris à faire preuve de plus d’intelligence dans ses paroles. « Oui…et je l’ai épousé ! » précisa t’il histoire que son interlocuteur comprenne qu’Elena était prise et qu’il ne valait mieux pas pour lui qu’il tourne autour de sa douce et de leur fils. Il avait déjà du faire avec un fou, il ne voulait pas que ça recommence. Pourtant au fond de lui, il y avait cette petite voix qui lui disait qu’il ne craignait rien, que cet homme était comme Don Diego, un homme de valeurs. « Mon maitre s’appelait Don Diego de La Vega, il m’a formé et j’ai pris sa suite, il y a de cela plusieurs années avant de me retrouver ici. » Précisa t’il à son double d’un autre monde pour qu’il comprenne mieux la situation. « Le Zorro que j’ai connu, était plus âgé que vous… C’était un grand homme, je n’ai hélas pas eu la chance de le connaitre longtemps. » Il aurait aimé que cela soit le contraire, mais il savait que Don Diego était parti après avoir accompli ce qu’il désirait et surtout dans les bras de sa fille qu’il avait tant aimé.

« Il nous a donné sa bénédiction avant que la mort ne le prenne… » Le pire dans cette histoire, c’est qu’Elena n’avait pas eu la chance de connaitre son père, Alejandro l’avait plus connu qu’elle. Il lui en avait souvent parlé, essayant de lui faire connaitre l’homme que lui avait connu, mais ça ne remplaçait pas l’amour d’un père qu’elle n’avait jamais pu avoir à cause de Montero. « Ma femme m’a parlé de vous. » dit-il avant de flatter l’encolure de son étalon qui faisait connaissance avec le Tornado de l’autre Zorro. « Vous êtes une version alternative de son père… Elle était heureuse de vous rencontrer. »

@Diego de la Vega