Le jeu cruel du destin | Barbara L. & Dick

Dick avait décidé de démissionner du commissariat seulement quelques mois après la promotion de l'école de police, où il y était entré sous le nom qu'il avait avec la malédiction, Dante Lockley. Alors forcément, il avait eu les compassions hypocrites des doyens de la polique qui lui disaient poliement "ce n'est pas grave, c'est même courageux d'être honnête avec soi-même et de comprendre que ce n'est pas pour toi, bonne continuation"... alors qu'en réalité ils se moquaient de lui dans son dos, passant pour le jeune flic qui a cru être un héros en rentrant à l'école de police et qui n'a pas eu les épaules d'assumer jusqu'au bout. Dick savait parfaitement ce qu'ils avaient pensé de lui en quittant aussi vite après y être arrivé mais il s'en fichait. Au contraire même : tant mieux, sa couverture n'en serait que plus épaisse.

Il s'était réveillé de cette malédiction, avait obtenu les explications du TVA comme tout le monde concernant la chute du multivers et les mystères autour de l'arrivée de certains survivants ici (ce qui n'avait pas tant choqué Dick qui avait déjà entendu certaines histoires de multivers dans les récits de Bruce sur les affaires de la Justice League) et Dick avait décidé de reprendre le role de Nightwing dans ce nouveau monde qui ne serait pas exempt de perversité et de cruauté. Au contraire, la réunion de survivants de tout un multivers pouvait certainement engendrer des crimes qui pourraient sans doute dépasser ceux de la Gotham City qu'il a connu. Dick a grandi pour servir ainsi et vivre à Baiame ne l'en empêcherait pas. Alors il avait quitté la police pour vivre plus discrètement. Il avait déjà eu la couverture de policier à Bludhaven pendant qu'il commençait à devenir un justicier indépendant, mais il lui fallait davantage de recul dans ce nouveau monde à apprivoiser.

Il vivait ainsi depuis qu'il était redevenu lui même donc, essayant parfois de voir s'il pouvait contribuer à trouver quelconque responsable au déclin du multivers, ou alors de trouver les siens s'ils avaient survécu au multivers - Bruce, Barbara, Jason, Wally, Kory, Conner, Garfield, Victor, Donna, Rachel... tant de gens qu'il espérait voir encore en vie, et la liste n'était même pas complète. Durant ce temps, les souvenirs de sa malédiction lui trottaient parfois en tête, miroir psychologique reflétant son passé et ses démons, comme une longue, violente et cruelle introspection imposée. Il pensait à ce que ça voulait dire de lui et de son inconscient, de ses défauts et ses barrières.

Aujourd'hui cependant ce n'était pas un souvenir aussi profond qui lui était revenu de sa malédiction mais un nom. Barbara, commissaire.

Barbara, c'était le nom dont il se souvenait. De son bref passage au commissariat du 99ème district, il ne pensait pas avoir déjà rencontré le commissaire mais on lui avait parlé d'elle, naturellement, et elle s'appellait Barbara. Il avait une photo encadrée aussi en tête, de ladite Barbara. Les traits étaient flous, mais il se souvient de cheveux roux.

Barbara, commissaire, aux cheveux roux. Dick devait y retourner, il devait en avoir le coeur net.

Il ne prit pas rendez-vous, ne voulant pas redonner son nom qui n'était plus le sien et minimiser les traces de son passage qu'importe l'endroit, et il se rendit au commissariat en semaine, un jour où le commissaire s'y trouverait selon les agendas qu'on lui avait fourni.

La personne qu'il vit derrière la porte qu'on finit par lui ouvrir, dans son bureau, n'était pas la Barbara qu'il connaissait de toutes évidences. Elle avait dépassé l'age de sa meilleure amie, mais pourtant, dans l'inconnu de ses traits un sentiment étrangement familier le hantait en la regardant.

Pire : le nom inscrit sur sa porte était Commissaire Gordon.

Plus de doute à présent, le multivers avait placé ici une variation de Batgirl, comme u cruel rappel au fait que son univers à lui n'était pas complet.

Bonjour, je suis désolé de vous importuner, j'ai eu l'urgence de venir vous voir, commença-t-il, quelque peu troublé. J'étais brièvement ici sous le nom de Dante Lockley, vous avez peut-être entendu parler de mon départ prématuré.

Il laissa un silence avant de reprendre. Ce n'était pas mon vrai nom. Je m'appelle Richard Grayson, mais personne ne m'appelle comme ça. On m'appelle Dick, mais je crois que vous le savez.

Il faudrait vérifier auprès d'un docteur après coup, mais Dick était à peu près certain d'avoir fait une descente d'organe. Ok, il avait été familier avec les termes du Multivers, que ce soit par ce qu'il avait su de la Justice League que par la situation particulière de Baiame. Ok, il avait bien compris qu'il venait rencontrer une Barbara Gordon issue de ce multivers noueux qui n'était pas celle qu'il avait connu et avec qui il avait grandi depuis son adolescence. D'accord.

Mais jamais il n'aurait pu anticiper un tel scenario. Figé sous le choc, il se laissa guider par le commissaire Gordon en dehors de son bureau avec un air ébété fixé sur le visage. Il serra à peine les dents lorsqu'il heurta le mur avec force, un coup qui semblait le recalibrer à la chronologie en place. Oui, je sais, répondit-il d'abord à propos des arts martiaux, essayant encore de remettre ses idées dans un ordre cohérent après la surprise que lui avait causé cette histoire de paternité. Tu les as apprise au même endroit que moi.

D'un mouvement rapide et vif, Dick parvint à se défaire de l'emprise, en changeant d'art martial : il n'utilisa aucune des techniques apprises auprès de Bruce, mais celle qu'on lui avait enseigné à la Cour des Hiboux du temps où le Joker lui avait lavé le cerveau. Dick connaissait la force de sa Barbara, supposant que celle-ci devait être tout aussi forte au minimum, et il se doutait qu'il lui faudrait des techniques un peu différentes qui ne figuraient pas à l'épais repertoire de la batcave.

J'avoue que je ne m'attendais pas à une telle... situation en venant, dit-il d'abord, hésitant. Et je n'ai jamais regardé ma Barbara de cette façon, rajouta-t-il en étant extremement perturbé à cette idée. Les seuls sentiments qu'il avait eu dans sa vie avaient commencé à fleurir pour Koriand'r, et il avait connu quelques attirances purement physiques pour certaines autres filles comme Kara ou Donna avec qui il avait eu des aventures brèves, mais jamais n'avait-il pensé qu'un jour il pouvait sortir avec Barbara, ou plus encore : lui donner un enfant. Cette idée lui mélangeait l'estomac.

Mais vous vous appelez Barbara Gordon, vous avez pris la cape de Batgirl pour rejoindre la croisade de Batman et Robin. Je suis Richard Grayson, mais tout le monde m'appelle Dick. Je suis devenu Robin après avoir été recuilli par Bruce Wayne, aka Batman, lorsque mes parents sont morts dans un cirque. Mais j'ai fini par suivre ma propore voix, celle de Nightwing, annonça-t-il de but en blanc pour lui prouver que c'était bien lui.

Le multivers a son propre sens de l'humour qui n'est pas du gout de tout le monde, je suis d'accord, continua-t-il plus calmement, les mains devant lui. Je pensais rencontrer une meilleure amie, je n'avais pas conscience qu'il existait une version de la réalité où vous avez un fils avec... Il s'arreta dans sa phrase.

Je ne voulais pas... faire ça. Je voulais venir en ami, pas en faux espoir, ou en intru. Je suis vraiment désolé, s'excusa-t-il avec sa plus grande sincérité.