Cauchemars post-traumatiques | Théodore & Sawyer

C'était une danse agréable qu'il était content de retrouver depuis le retour de ses souvenirs. Sab était perché dans le ciel, entouré du sable qui lui permettait cette suspension face à l'étendue immense de l'Océan Pacifique qui brillait sous la lumière nocturne de la Lune, alors qu'en dessous, des rêves formés par le sable magique dansaient autour du Sandy's Dream Motel. Des sirènes nageaient dans les airs autour des fenêtres, des diplodocus marchaient sur le parking, des pirates dansaient joyeusement sur les épaves de bateaux sur la plage adjaçantes... tous les rêves des petits et des plus grands qui dormaient chez lui. Il tournait la tête pour s'assurer de quelques autres petits rêves en ville : du chocolat sautillant par-ci, des dents par là, des flocons et des sucres d'orges volants plus loin...

Autrefois, il observait les rêves de toute la face nocturne de la Terre, en suivant le coucher du soleil et l'ascension de l'Homme de la Lune. Ca lui manquait de veiller sur tout le monde, et s'il le voulait il l'aurait bien fait, mais ce monde n'était pas régit par les mêmes règles. Même Baiame étant remplie d'êtres de tous les univers, qui n'avaient pas non plus les mêmes rapports aux rêves ou aux fêtes. Sawyer pourrait tout à fait veiller sur leurs rêves aussi, mais cela lui viendrait moins naturellement et lui demanderait plus d'effort : pas tout le monde croyait en lui puisqu'il n'existait pas partout. Même la Lune ici, si elle avait gardé le même éclat magnifique, ne semblait plus du tout habitée par l'Homme qui les avait tous nommé.

Alors il se contentait de faire l'effort au motel qu'il possédait. Il avait au moins encore un domaine où il pouvait promettre à ceux qui le voulaient bien les rêves qu'il partageait pour embaumer tout un chacun. Sawyer en était le gardien, accédant forcément à l'intimité de l'âme de ceux qu'il touchait avec son sable, mais ne dévoilant aucun secret. Ce sable doré et brillant, d'ailleurs, n'était visible par personne d'autres, à moins que l'on soit un Gardien ou qu'on ait un minimum de pouvoirs sur les rêves.

C'est pour cela qu'on frisson parcourut son échine lorsqu'il se sentit observé. Bunnymund et North n'avaient pas retrouvés leurs souvenirs, alors il aurait été surprenant de les remarquer ici. Ceci dit, Jack, Toothiana et Nightlight n'étaient pas non plus dans les parages. Pourtant, certains rêves commençait à s'affoler. Les diplodocus de sable avaient pour certains le comportement d'un cheval effrayé qui reculait pour changer sa course et fuir.

Pitch. Le Croque-Mitaine. Son ennemi cauchemardesque depuis bien plus longtemps que sa vie de Gardien. Celui qu'il avait combattu avec Nightlight depuis sa précédente vie, dans les étoiles. Celui qui avait causé sa mort avant que l'Homme de la Lune ne vienne. Ses cauchemars avaient été étouffés par les Gardiens il y a bien des années, mais il était le seul qu'il savait capable de tourmenter les rêves rien qu'en les observant. Pitch avait sans doute survécu à la destruction du Multivers aussi, et le voilà à Baiame. Sa malédiction s'était sans doute terminée.

Le regard determiné, Sawyer prit une grande inspiration, et fit apparaitre deux fouets de sable dans ses mains. Il repéra l'épicentre de la zone que semblaient vouloir fuir les rêves, et il s'y rendit aussitot en volant. Arrivé sur place, il repéra aussitot l'individu qu'il captura comme avec un lasso.

Un point d'exclamation de sable se dessina au dessus de sa tête alors que la surprise se lit sur son visage. Cet homme n'était pas Pitch. Il ne lui ressemblait pas, mais Sawyer ne s'arrêta pas au physique (Pitch était trompeur), il ressentait grace au sable qu'à l'intérieur non plus il était un autre homme.

Mais la surprise fit place à de la méfiance à nouveau malgré tout, alors que le point d'exclamation se changea en interrogation pour exiger à l'inconnu des explications. Il n'était peut être pas le Croque Mitaine de son univers, mais les cauchemars semblaient être fort en ce garçon, et Sawyer avait appris le principe du Multivers : Pitch pouvait exister sous d'autres visages.

Le regard curieux de Sawyer se baissa sur ce qu'indiquait l'inconnu aux cauchemars. Sawyer se surprit de deux choses : son interlocuteur n'avait pas l'air de beaucoup parler (ce qui l'attendrit un peu, lui qui était muet), et au sol se trouvait une arme, qui ne lui appartenait pas. Un instant plus tard, les yeux du jeune homme s'ouvrirent en grand, remplis de confusion alors qu'il comprenait. Il voulut défaire sa corde de sable et se reculer de lui, mais il tira sur celle-ci, ce qui eut pour effet de faire perdre l'équilibre au marchand de sable qui chuta en avant, contre lui, dans une proximité intimidiante.

Les joues de Sawyer se rosirent, alors que, ainsi collés à cause de la chute, leurs visages se trouvaient étonnament près l'un de l'autre. Sawyer se défit aussitôt. Les épaules de Sawyer s'affaissèrent alors qu'il réalisait son erreur et le sable de forma devant lui, dessinant alors pour exprimer d'abord une excuse.

L'excuse fut rapidement suivie en lui demandant s'il allait bien. S'il s'était fait agressé, Sawyer s'en serait voulu d'avoir aggravé ce qu'il s'était passé. Il avait supposé le pire, et en faisant cela, il avait causé du tort, ce qui allait à l'encontre de la personne qu'il était. Ses yeux inquiets et coupables imploraient donc un pardon alors que le sable illustrait tout ça, dans l'espoir de se faire comprendre.

Cependant, après un instant, Sawyer pencha la tête, l'inquiétude se mélange alors avec une curiosité, ou une incompréhension, alors qu'un point d'interrogation de sable se formait. Les dessins illustrés de Sawyer racontaient à présent une petite histoire de cauchemars qui terrifiaient ses rêves, avant de lui faire comprendre qu'il avait ressenti ça chez lui.

Hors, et il le lui dit aussi avec le sable, le garçon qu'il avait devant lui n'avait pas l'air d'être une terreur nocturne. Il le pointa du doigt pour demander, en tout respect, qui était-il. Et surtout, dans la question suivante, il lui demanda s'il allait bien. Sawyer se permit de s'approcher un peu plus, et demanda l'autorisation silencieuse de pouvoir poser deux doigts sur son front afin d'apaiser son esprit avec ses rêves.