« Pfff quelle nuit !!! » Esteban referma la porte de la caserne derrière lui. Il était le dernier à partir et commençait sérieusement à ressentir de la fatigue. Sa montre indiquait plus de 2 heures du matin et son corps lui réclamait une bonne nuit de sommeil. Cette soirée avait été mémorable, il avait été appelé aux alentours de 17h et les interventions s’étaient succédées jusqu’à la dernière, un accident de voiture avec une jeune fille impliquée. Il lui avait été tenu la main pendant pas mal de temps pour la rassurer, ça faisait aussi partie de son boulot, même si parfois ce n’était pas facile. La jeune fille avait eu de la chance, elle passerait quelques jours à l’hôpital, mais s’en sortirait, ce n’était pas toujours le cas, et il avait appris à porter une carapace pour ne pas être trop touché par ce qu’il voyait. Dès qu’il enlevait sa tenue de pompier, il laissait derrière lui ce qui c’était passé enfin de ne pas être trop impliqué émotionnellement et ça marchait bien.

Il était temps pour lui de rentrer à la maison, même s’il n’était pas vraiment chez lui, mais plus il y vivait et plus il avait l’impression d’être là où il devait être. Sûrement, à cause de la présence d’Esperanza, même s’il la fuyait depuis une bonne grosse semaine. La dernière fois qu’il s’était retrouvé dans la même pièce, ils avaient failli se sauter dessus. Entre eux, il existait une sensualité certaine, une attirance à laquelle ni elle ni lui ne pouvaient lutter. Esteban avait essayé de la mettre de côté en restant éloigné, il bossait aux écuries, retapait la pièce du petit et quand elle arrivait, il trouvait toujours quelque chose à faire. Il avait pris l’habitude de lui préparer à manger tous les jours, histoire qu’elle prenne des forces avant son accouchement et aussi parce que ça lui faisait plaisir de l’imaginer se régaler en mangeant ses plats.

Esteban aurait préféré être uniquement attiré par le physique de la brune, physique qui était plus que flatteur, mais plus le temps passé et plus il savait que ça allait au-delà de l’attirance physique. Leur attraction physique lui manquait, c’était certain, mais elle aussi, sa voix, sa manière de lui parler, de bouger, de regarder. Leurs discussions aussi, limpides et faciles. La plupart des femmes l’ennuyaient, mais pas elle, il restait toujours pendu à ses lèvres et aurait pu y rester pendant des heures… Bordel, il était en train de tomber amoureux !!! Esteban roula les yeux au ciel, c’était bien la dernière chose qu’il voulait, lui qui avait toujours essayé de ne pas rentrer dans ce truc-là… Sauf que maintenant, qu’il y était et bien, il n’avait plus envie d’en partir.

Quand il arriva dans la grande maison bourgeoise, il retira ses chaussures et n’alluma pas les lumières. Il ne voulait pas la réveiller, elle avait besoin de repos et il savait se montrer discret, en tout cas, quand il le désirait. Il hésita pendant quelques secondes entre aller directement dans sa chambre ou passer par la cuisine et opta pour la deuxième option dans le but d’étancher sa soif. Il s’apprêtait à rentrer dans la cuisine, quand il sentit quelqu’un le percuter avec délicatesse. Son parfum l’enivra et il n’eut pas besoin de réfléchir pour savoir qui se trouver devant lui. « Esperanza… » Dit-il d’une voix presque plaintive d’avoir autant attendu pour reprononcer son prénom. Puis il ouvrit les yeux et il se sentit vaciller tandis que son regard glissait sur son corps parfait recouvert uniquement d’une fine nuisette en dentelles… « heu…bonjour…enfin non bonsoir.. » Mais quel boulet, parfois il se fatiguait lui-même. « Vous aviez faim ? » Demanda-t-il en indiquant du regard la glace à la vanille qu’elle tenait dans ses mains, glace à la vanille réalisée par ses soins. « Elle est bonne ? » Demanda-t-il, même s’il n’était pas sûr de parler uniquement de la glace.

@Esperanza Montero

Durant tout le trajet en voiture, Esteban n’avait fait que penser à Esperanza et cela ne lui ressemblait pas. Elle hantait ses pensées et animait ses rêves depuis des semaines et si cela lui avait convenu pendant un temps, il sentait s’installer le manque. Celui qui vous plombe l’estomac et vous corromps l’esprit. Celui qui vous pousse à aller au-delà des limites que vous vous êtes franchis, seulement parce que votre cœur en a décidé autrement et que vous êtes incapable d’y résister. Il ne la connaissait pas depuis longtemps, quelques semaines tout au plus et pourtant au fond de lui il avait le sentiment de la connaitre depuis des années, comme deux amants qui se retrouvent enfin. Une étrangeté qui aurait dû l’inquiéter, mais Esteban s’en moquait, parce que s’il y avait une chose à ne pas craindre, c’était elle. Certaines choses n’ont pas besoin d’explication et ce qu’il ressentait pour elle, faisait clairement partie de cette catégorie-là. Il ne savait pas encore combien de temps il lui faudrait pour céder et se retrouver face à elle pour avoir une vraie discussion, pour laisser glisser des doigts sur sa joue, et lui exprimait ce qu’elle avait fait de lui en si peu de temps. Plusieurs choses le retenaient encore. Il y avait déjà toute son enfance, ses doutes et ses craintes face à l’abandon qui avaient toujours guidé sa vie jusqu’ici. La fuite avait été sa meilleure alliée pendant des années et aujourd’hui il comprenait que même cette dernière ne l’aiderait pas, car il en était tout bonnement incapable. Puis il y avait sa situation, il était quand même accusé de meurtre et il ne voulait pas que cela impacte la carrière de la jeune femme, surtout qu’elle était passionnée par son travail. Et pour finir, il lui arrivait parfois de se dire qu’il avait inventé tout ça, toute cette attraction, qu’elle n’était qu’une invention de son esprit. Si ça se trouve pour elle, il n’était qu’un locataire sympathique, et rien de plus.

C’était dans cet état d’esprit, mitigé, qu’il regagna la chaleur de grande demeure victorienne après avoir cueillit des lys. Il ressentit tout de suite un sentiment d’apaisement, de sécurité, comme il ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Cela faisait des années qu’il ne s’était pas senti chez lui, mais ici, entre ces murs s’étaient le cas. Il jeta un rapide coup d’œil au sofa où il avait retrouvé Esperanza endormie en fin d’après-midi. Cela l’avait d’ailleurs arrangé, mais il n’avait pas pu empêcher de la recouvrir d’un plaid molletonné pour éviter qu’elle ne prenne froid. Elle n’était plus là bien évidemment et il esquissa un sourire en l’imaginant endormi dans son lit, paisible.

Une chose était sûre, il ne s’attendait pas à la retrouver dans la cuisine, encore moins dans cette tenue… Pas réflexe, il cacha les lys derrière son dos, pour ne pas passer pour le mec neuneu qui ramène des fleurs à sa petite amie, avant de comprendre que le fait de le cacher était encore plus ridicule. « Je…vous..Lys… » Il essayait tant bien que mal de la regarder dans les yeux, mais cela s’avérait être un exercice difficile. Son regard n’arrêtait pas de dévier vers sa poitrine volumineuse dût à sa grossesse. Il arriva quand même à déposer les lys dans le vase où se trouvait les fleurs, sans bouger de place, un vrai exploit. De toute façon, il était tellement sous le charme qu’il n’était pas près de réussir à décoller de l’endroit ou il se trouvait, encore moins après qu’elle ait prononcé son nom avec une telle sensualité, qu’il espérait l’entendre prononcer ainsi chaque jour à partir d’aujourd’hui… Il déglutit, en redressant la tête pour poser ses yeux dans le regard incandescent de la jeune femme. Non… ça n’allait pas du tout aider ! « Hmmmm… une fringale… » dit-il d’une voix rocailleuse alors qu’il essayait de se contrôler pour se comporter en gentleman. « Je suis très doué, ça ne m’étonne pas… tout est dans le doigté. » Dit-il en parlant de la réalisation de sa glace à la vanille ou peut-être qu’il parle d’autre chose, mais ça c’est un secret.
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Il haussa les sourcils et se rapprocha encore un peu plus d’elle pour l’observer un peu mieux… « On parle vraiment de la glace ? » Il n’en était pas certain et rajouta d’une voix particulièrement séduisant. « En ce moment, je pense à bien des choses, mais pas à la glace… » Non, cette dernière était bien loin dans ses pensées, très, très, très loin…

@Esperanza Montero

Elle jouait clairement avec ses nerfs, un petit jeu qui plaisait un peu trop à Esteban qui essayait, tant qu’il le pouvait encore de s’accrocher au peu de motivation qui lui restait pour partir en direction de sa chambre. Sauf qu’entre lui et son propre lit, il y avait Esperanza et un millier d’autres possibilités bien plus intéressantes qui balayèrent rapidement son envie de se retrouver seul dans sa chambre. Étrangement, il n’était plus du tout fatigué, il avait retrouvé toute son énergie en l’espace de quelques secondes et cela ne venait pas de la glace à la vanille qu’Esperanza tenait dans ses mains. Quelle bonne idée avait-il eu le jour où il le lui avait préparé ? À ce moment-là, il ne s’était pas imaginé, à quel point une glace à la vanille pouvait devenir si intéressante…

Dans son regard, il voit tout ce qu’il ressent, tout ce qui l’alimente et fait pulser le sang dans ses veines qui sont de plus en plus à fleur de peau. Les respirations de la brune le caressent, éveillant ses sens et son désir qu’il bat dans le creux de ses reins. Elle aurait pu partir, regagner sa chambre ou même se sentir gênée de se trouver ici, dans cette tenue, avec lui. Mais non, il le voyait bien que cette situation lui plaisait, qu’elle adorait le faire languir et se sentir désiré. Ce qu’il n’arrivait pas à lui cacher, c’était impossible, cela se lisait dans son regard ardent et dans sa respiration saccadée. Il n’aurait jamais dû s’éloigner d’elle, cela n’avait fait qu’accroître sa dépense et maintenant, il devait y faire face.

« En effet vous êtes bien éveillée… » Un peu trop peut-être, mais ça, c’est juste un plus qui n’est pas vraiment dérangeant. Il laisse une fois de plus son regard balayer la tenue d’Esperanza qui met en valeur ses courbes. Sa grossesse la sublime, c’est certain et raccourcit encore un peu plus le tissu déjà court pour recouvrir son ventre rebondi… Un vrai appel à la luxure qui lui est bien difficile de ne pas écouter. Sans équivoque, elle le cherche, joue de ses nombreux atouts pour le prendre de sa toile, mais elle n’a pas besoin de ça, il est déjà à sa merci depuis qu’il l’a rencontré dans son cabinet… « Je veux bien le croire… » laisse t’il échapper dans un léger murmure, conscient que les mains de belle sont capables de réaliser des merveilles ? « Mais surtout pas dans la cuisine… » Non, il préférait qu’elle les utilise autrement, comme pour découvrir son corps musclé par exemple.

Il a envie de la dévorer, encore plus quand elle savoure la glace en faisant bien exprès de titiller les hormones déjà bien agitées du pompier… « À deux … ça se savoure à deux. » lui glisse t’il alors qu’ils sont très proches, trop proches, mais avant qu’il ne puisse l’attraper, elle lui échappe. Elle se glisse entre lui et la porte, pour partir en direction de sa chambre, tandis qu’il l’observait jouant avec l’idée de regagner sa foutue chambre comme un gentil garçon. Pourtant, il ne bouge pas, préférant l’observer avancer de sa démarche chalouper, jusqu’à ce qu’elle lui lance la phrase de trop… Un appel auquel il devrait résister, mais il n’en a pas envie… Il n’en est pas capable. Il ne lui faut que quelques secondes pour la rattraper et saisir délicatement sa main entre ses doigts pour la ramener vers lui. Le seul problème, c’est qu’il n’avait pas calculé la table basse qui se trouvait juste devant lui. Il fait un pas de trop et se prend le pied dans le bois avant de s’écrouler sur cette dernière, entrainant la brune avec lui. Il a juste le temps de la rattraper pour ne pas qu’elle se fasse mal, mais la situation n’a rien pour lui déplaire, vu qu’elle se retrouve sur lui, ce qui est loin de lui déplaire. « Vous allez bien ? » demanda t’il avant de poser une main brûlante sur la joue d’Esperanza. Un contact électrisant et libérateur qui lui semble presque familier. « Vous m’avez envoûté… » dit-il avant de l’embrasser comme si sa vie en dépendait. Un baiser profond, brûlant et enflammé qui risque de l’amener vers un chemin des plus agréable et attendu.

@Esperanza Montero

Elle se jouait de lui avec une telle facilité déconcertante, mais cela ne le dérangeait pas. Lui, qui à la base, aimait mener la danse, trouvait un certain plaisir à se laisser porter, surtout qu’il n’était pas le dernier pour raviver leurs échanges. Il avait arrêté de réfléchir à ce qui pouvait autant le pousser à vouloir se retrouver avec elle, cela n’aurait servi à rien, parce que de toute façon, c’était une puissance qui le balayait totalement et à laquelle il n’avait envie d’opposer aucune résistance. Bien au contraire, il rêvait d’y céder, de se perdre avec elle, dans cet océan de désir qu’il avait tant essayé d’oublier, mais qu’il le ramenait toujours à elle. Dans la pénombre de leur intimité naissante, il sentait ses barrières cédées une à une, ne laissant de lui que sa vulnérabilité qu’il cachait pourtant si bien.
Il savait qu’il aurait mieux fait de la laisser là, de ne pas céder à la tentation pour partir se coucher et laisser ses rêves faire le reste, sauf qu’elle ne lui facilitait pas la tâche et que plus le temps s’écoulait plus il sentait qu’il en serait incapable. S’il ne cédait pas maintenant, ça serait demain, ou dans deux jours, mais il ne pouvait clairement pas continuer comme ça… Encore moins avec des allusions pareilles.

Pour la première fois de sa vie, Esteban voulait que les choses soient bien faites, car il savait qu’elle n’était pas n’importe quelle fille, qu’elle ne serait pas un coup d’un soir qu’on ne revoit jamais et dont on oublie le prénom quelques jours plus tard. Il voulait faire ça bien, que ça soit marquant et cela le surprenait, ça ne lui était jamais arrivé avant, mais cela ne voulait pas non plus dire qu’il allait garder ses mains dans les poches. Il devait arrêter de trop réfléchir, aux barrières qu’il continuait d’essayer de reconsolider pour rester maître de la situation, mais à chaque tentative, il échouait lamentablement et les barrières retombaient. Elle était enceinte, cela devrait lui suffire pour ne pas la toucher, sauf que pour lui, cela la rendait encore plus séduisante. C’était son avocate et il ne voulait pas qu’elle ait d’ennuis à cause de lui… mais bon finalement leur relation ne regardait qu’eux et puis il y avait lui, qui n’était clairement pas le genre de mec qui évoluait dans son cercle, mais une fois de plus, il balaya cette pensée d’un revers de mains… En fait, il s’en foutait, rien de cela n’avait d’importance !


@Esperanza Montero

Des femmes, il en avait rencontré un paquet dans sa vie, mais des femmes comme Esperanza, il n’en avait rencontré qu’une et elle se trouvait devant lui. Le genre de rencontre qu’on ne fait qu’une fois dans une vie et que certains passent une éternité à chercher sans jamais la trouver. Lui n’avait pas eu besoin de chercher, le destin s’en était chargé pour lui et il était même content d’avoir fini dans son bureau. Comme quoi sa bonne action avait eu plus d’une bonne répercussion. Il y avait ce gamin qui pouvait continuer sa vie et puis il y avait lui qui avait rencontré cette femme exceptionnelle. Esperanza n’était pas dans sa vie depuis longtemps, mais elle avait pris une grande place, la plus importante de toute, celle qu’il avait toujours bien gardé. A croire qu’il avait passé sa vie à l’entendre sans jamais l’espérer… Mais maintenant, qu’il l’avait rencontré il ne risquait pas de la laisser partir. Il ne savait pas où cette histoire le mènerait, mais il était certain d’une chose, il ferait tout pour qu’elle dure et ne pas tout gâcher. Il était tombé follement amoureux de cette femme en un simple battement de cœur et maintenant il se languissait d’apprendre à plus la connaitre, de passer au-delà de leur simple lien d’avocate et de client ou de propriétaire et locataire. Son envie d’apprendre à la connaitre, aller bien au-delà de partager son lit. Non, il voulait en apprendre plus sur elle, sur ce qu’elle aimait, à part lui rendre la vie impossible, ce qu’elle espérait. Tout ce genre de trucs qui ne l’intéressait jamais, mais avec elle c’était différent, il était capable de l’écouter parler pendant des heures.

Il ne s’était sûrement pas attendu en rentrant chez lui ce soir-là à finir dans cette position. Etalé contre une table en bois brisée avec Esperanza assise sur son entrejambe. Il n’avait pas eu assez d’imagination pour ça et était ravi que ça ne soit pas le cas, ça laissait plus de place à la surprise. Esteban a l’impression qu’un poids en lui se libère quand enfin ils se laissent aller à leurs émotions. Il comprend alors qu’il a passé une semaine en apnée, se coupant de ses émotions pour ne pas faire de connerie, mais maintenant qu’il a cédé, il a fin l’impression de se retrouver et cela c’est grâce à elle. Il a l’impression qu’elle lui permet d’être lui-même et ça n’a pas de prix.


@Esperanza Montero