La matinée venait tout juste de commencer sous un grand soleil, si bien que Solal avait envie de claquer la porte de son cabinet pour prendre un café en terrasse et profiter du beau temps. Il allait partir acheter une bonne entrecôte pour faire un barbecue ce soir avec ses deux adolescents qui avalaient une quantité impressionnante de nourriture. Il n’avait pas l’impression d’avoir été comme ça à leur âge, mais peut-être que c’était parce qu’il ne faisait pas les courses et se moquait bien de dévorer le contenu des placards familiaux. Maintenant, qu’il était père célibataire, il voyait les choses autrement même et commençait à en avoir marre de voir ses placards se vider plus vite que sa panière de linge sale. Enfin bref, c’était la vie qu’il avait choisie et il l’adorait, mais parfois, il aimerait, juste pour quelques secondes, s’asseoir en terrassant avec un café et juste apprécier le temps qui passe. Pour le moment ? Hélas, le temps défilé, mais pas à son avantage, car s’il commençait à prendre du retard sur ses patients, il ne pourrait jamais acheter son entrecôte et devrait donc dire au revoir à son envie de Barbecue. Impossible ! Il allait enchaîner ses rendez—vous avec professionnalisme et rentrer chez lui pour partager un repas digne de ce nom avec ces deux ados, qui au bout de deux minutes finiraient sûrement avec les yeux rivés à leur téléphone. L’idée d’inviter sa très charmante voisine lui effleura l’esprit avant de se souvenir, qu’il s’agissait d’une patiente et que cela pourrait être mal perçu.. Solal finit par abandonner son bureau pour partir en direction de la salle d’attente. Pour le moment, elle était quasiment vide, juste une jeune fille attendait tranquillement sa consultation. Il fallut quelques secondes au brun pour se souvenir de son nom de famille. « Mademoiselle Suntear ? » demanda t’il poliment en se disant à lui-même que s’il commençait déjà à oublier le nom de ses patients à 40 ans, qu’est-ce que ça serait à 60…

Sa patiente était blonde, jeune, peut-être même pas encore majeur, elle semblait un peu stressée, ce qui arrivait souvent lorsqu’il recevait le plus souvent lors des premières consultations. La gynécologie demandait une relation de confiance entre le praticien et la patiente, Solal prenait toujours le temps pour rassurer ses patientes. Parfois cela lui prenait du temps, mais il savait que c’était du temps gagné par la suite. « Vous pouvez vous asseoir. » Dit-il tout en montrant de la main le siège qui se trouvait de l’autre côté de son bureau. « C’est votre première que je vous reçois ?» demanda-t’il avec courtoisie avant de s’asseoir à son bureau. Il réajuste son ordinateur portable et ouvrit le dossier concernant ça jeune fille. « Vous avez déjà consulté un gynécologue ou c’est votre première fois ? » Sa voix n’émettait aucun jugement, certaines jeunes filles consultaient plus tôt, d’autres plus tard, il n’y avait aucune règle. Pendant un bref instant, il se demanda si sa fille avait déjà posé les pieds chez un de ses confrères… Si c’était le cas, elle ne lui avait rien dit. Cette idée le fit tressaillir, c’était son petit bébé, elle ne pouvait être devenue si grande si vite. Il préférait ne même pas penser à la tête qu’il ferait, si un jour, elle venait lui demander de prendre la pilule. Ce qui était complètement stupide car donner une boite de préservatifs à son fils ne le dérangeait pas du tout. Deux poids deux mesures donc, mais ce n’était pas le moment pour ce genre de réflexion et il reporta toute son attention sur mademoiselle Suntear.

@Evangeline Suntear

Solal avait l’habitude de recevoir des jeunes femmes qui venaient consulter pour la toute première fois un gynécologue. Il était conscient que cela ne devait pas être très agréable, de passer la porte de son cabinet. De toute façon, qu’importe les spécialités médicales, la plupart des gens, dont il faisait partie d’ailleurs, préférait ne pas y avoir à faire. Lui par exemple détestait le dentiste, rien que le bruit des instruments lui donnait envie de partir en courant et pourtant il en fallait beaucoup pour lui faire peur. Heureusement pour, il possédait une très très bonne dentition et n’avait jamais eu aucunes carries, ce qui lui avait évité bien du stress.
Il esquissa un sourire rassurant tout en observant la jeune fille s’approchait. Elle n’était pas très grande, pas très à l’aise non plus, mais ce qui surprit le plus Solal, c’était la longueur de ses cheveux, rassemblant en une tresse haute. Pendant un instant il pensa à sa fille qui avait toujours détesté qu’on lui brosse les cheveux. Heureusement, qu’elle ne les avait jamais eu aussi long, ça aurait été un enfer de s’en occuper… Surtout que Charlie n’était pas très soignée, elle était plutôt du genre garçon manqué et ses cheveux ressemblaient plus souvent à un grand bordel qu’à la chevelure impeccable de mademoiselle Suntear.

« Vous savez, il n’est pas obligé d’avoir eu des rapports pour consulter un gynécologue. » Il a remarqué son gène et le comprend, il y a des choses qui ne sont pas facile à aborder et la sexualité en fait partie, et ce quelque soit les âges. Il voyait de tout des jeunes hyper ouverts sur le sujet et des femmes plus âgées gênée rien qu’en l’évoquant. C’était ainsi et Solal s’adaptait à ses clientes pour que le rendez vous se passe au mieux. « Ce qu’on va faire c’est juste vérifier avec une échographie votre uterus, voir si tout est normal et je vous montrerai les gestes à avoir pour vérifier par vous-même votre poitrine, c’est important même si vous êtes jeune, on a des cas de cancer de plus en plus tôt, c’est donc bien d’apprendre à vérifier par soi-même. » Il ne prévoyait rien de plus, car elle n’en avait pour le moment tout simplement pas besoin. « Pas de contraception du coup ? de douleurs pendant votre période ? » demanda t’il pour finir de tout rentrer dans son dossier ?

@Evangeline Suntear

« Mais bon, si pas de soucis particuliers, vous pouvez juste venir tout les deux pour faire un contrôle » lui précise t’il tout en notant ce qu’il faut dans son dossier. Il n’était pas du genre à demander à ses patientes de venir tous les ans, si elle n’en ressentait pas le besoin. La jeune femme semblait stresser et Solal le comprenait, c’était souvent le cas pour la plupart des femmes qui passait la porte d’entée de son cabinet. C’était une réaction assez normale qu’il comprenait et Solal se refusait à juger ses patientes. Il restait toujours professionnel, c’était pour lui la chose la plus importante dans son métier, en plus de l’empathie. « Assez calme ? » lui demanda-t’il en interrompant ce qu’il est en train de faire. « Vous pouvez préciser ? » A son âge, il n’était pas vraiment normal qu’elle n’ait pas des règles régulières, mais ça arrivait plus souvent que prévu et c’était bien à ça qu’il servait. « Ça vient de vous arriver ? ou ça a toujours été comme ça ? » lui demanda t’il pour plus de précisions, parce qu’il savait que ce genre de soucis pouvait en cacher d’autres et qu’il valait mieux s’en occuper plus tard que laisser trainer les choses. « Vous savez, vous pouvez parler sans trop de crainte, c’est mon métier, tout ce qui dit ici ne sort pas de mon cabinet. » dit-il pour la rassurer, voyant bien qu’elle était de moins en moins à l’aise.

C’est à ce moment là que son téléphone et que Solal jeta un coup d’œil à l’écran avant de laisser échapper un soupire. « Pas encore… » Son écran affichait en grosses lettres le mot « Lycée » ce qui ne signifiait jamais rien de bon. « Veuillez m'excuser, faut que je décroche. » Le bonheur d’être père de famille célibataire… Rapidement la voix du directeur se fit entendre et visiblement ce dernier était en colère. Charlie, sa fille, avait visiblement frappé un élève pour défendre l’oisillon avec lequel il avait décidé de s’amuser. Sauf que bien évidemment, même si l’idée était louable, frapper un élève demeurait toujours interdit… « Oui…oui, je comprends… » Laissa t’il échapper tout en roulant des yeux, quelque peu excédé avant de rajouter pour conclure l’appel. « Oui oui, c’est bon, je viendrais la chercher dans une heure ! » Puis il raccrocha son téléphone et reporta tout son attention vers la jeune fille qui lui faisait face. « Si un jour l’idée vous en dit, ne faite pas surtout pas d’enfant. » plaisanta t’il avant de rajouter. « On en était où déjà ? »


@Evangeline Suntear