Please, go away ! ∣ Caleb

J’avais rendez-vous à l’université avec le doyen. C’était simplement pour donner quelques cours de journalisme aux étudiants journalistes en devenir. Cela me permettrait d’avoir un peu plus d’argent qui rentre et de pouvoir faire véritablement plaisir à la plus belle des scientifiques que la terre ait portée. Cependant, Il fallait avant tout que je passe au café pour pouvoir amener un café à Lena. Je connaissais très bien ses horaires, je savais l’heure exacte à laquelle elle finissait le boulot alors autant être sur place avec un gobelet rempli de café bien chaud non ? 

Attendant dans la queue, je commande finalement deux lattés avant de payer ma consommation et me dirige jusqu’à l’université. Cependant, entre temps, ma super-ouïe me rappelant à l’ordre, je comprends rapidement que quelqu’un a besoin de mon aide. N’y attendant pas plus, ni une, ni deux, je prends mon envol. Atterrissant dans la ruelle derrière eux, je respire profondément. 

« Fais pas de conneries Kara » murmurais-je avant que mes yeux ne s’illuminent et que je ne vise juste à côté de la tête de l’emmerdeur. Apparaissent à la lumière, je pose mon regard sur les deux merdeux qui ennuyait l’homme qui se trouvait à mes côtés « Si vous tentez quoi que ce soit, je vous jure que vous allez le regretter. » énonçais-je. 

Vu leur regard, ils faisaient partis des éveillés. 

Le trafic routier n'est d'ordinaire pas si chaotique à cette heure-ci, mais un accident sur l'une des voies bloque toute la nationale, retardant grandement la plupart des riverains. Grognant entre ses dents, Caleb soupire, sachant pertinemment qu'il lui sera impossible de rentrer chez lui, en pleine banlieue ouest, à temps. Resté bloqué en plein centre-ville n'est pas une partie de plaisir, mais il prend son mal en patience.

Après plusieurs minutes à écouter les klaxons des moins patients et des plus virulents du volant, Caleb se résigne à faire demi-tour, venant se garer non loin d'un café. Quitte à attendre que les choses s'arrangent, autant le faire dans les meilleures conditions. Un petit Cortado avant de reprendre la route lui fera le plus grand bien.

Et il fait tâche avec sa Ford Mustang, sans doute l'une des voitures les plus chères de tout le parking. Une part de lui ne peut s'empêcher de juger toutes les autres automobiles, bien moins belles et moins bien entretenues - tout comme leurs propriétaires. Un côté snob qui ressurgit dès lors qu'il se retrouve loin des quartiers mondaines, chez les gens normaux. La faute à une enfance élevé dans l'opulence et la richesse. Snobisme qui ne s'est en rien arrangé depuis qu'il est devenu présentateur.

Mais avant même qu'il ait le temps d'entrer dans le café, deux mecs baraqués s'empare de lui, un de chaque côté, l'entraînant dans une des ruelles adjacentes. Caleb n'a pas besoin de réfléchir très longtemps pour comprendre leurs intentions. Il est riche et célèbre : à tous les coups, c'est une façon de le dépouiller avant de le fracasser. Ou alors c'est une tentative de le kidnapper avant de demander une rançon un peu plus tard. Dans tous les cas, Caleb n'a pas la moindre chance. Malgré sa carrure, il est loin de faire le poids face aux deux autres.

Et Caleb est scandalisé d'être ainsi touché par des personnes aussi abjectes, autant sur le point éthique, que sur le plan physique. Leur sweater n'a sans doute pas été lavée depuis trois jours ! Quelle déchéance ! Et voilà qu'ils osent abîmer sa veste !

S'il se débat du mieux qu'il le peut, c'est peine perdu. Du moins, avant qu'une demoiselle n’atterrisse en plein devant eux, drôlement vêtue. C'est sans doute un détail étrange à remarquer quand on est sur le point de se faire tabasser, mais le snobisme de Caleb refait surface. Du rouge et du bleu criards, qui lui font mal aux yeux. Il la reconnaît aisément: Supergirl, pour avoir fait les gros titres à plusieurs reprises dans les journaux.

Elle est bien plus petite qu'il l'a imaginé. Mais au vu de la réaction de ses ravisseurs, la taille est un facteur négligeable, sa réputation étant bien plus impressionnante. Après tout, au vu de ses exploits (dont celui d'envoyer valser des mecs dix fois plus costauds qu'elle), il y a de quoi être sur ses gardes.

Supergirl ! Vous tombez à pic ! Sauvez-moi de ces personnes qui ne savent pas faire la différence entre un sac poubelle et un sweater de qualité !

Alors oui, ses priorités sont loin d'être prioritaires voire même importantes, mais le blond ne supporte pas d'être ainsi malmené, ni même d'être en contact avec le mauvais goût. Si ses ravisseurs refusent toujours autant de le laisser partir, Caleb sait pertinemment qu'ils n'ont aucune chance face à l'héroïne. Ces ravisseurs étant distraits par cette dernière, il tente le tout pour le tout, en les bousculant, parvenant à relâcher la prise de l'un d'eux. Ce qui s'avère être une mauvaise idée lorsque le second, bien moins patient, tire un pistolet de sa poche et le pointe en plein sur la tempe de Caleb.

Dire qu'il voulait juste un café.
Sa villa en bord de plage lui manque terriblement.

Je pousse un soupir avant de tourner le regard vers l'homme dont je venais de sauver la vie. Je le reconnais rapidement. Le présentateur du JT. Levant les yeux au ciel, je tourne le regard vers la petite bande qui s'était amusé à l'emmerder quelque temps plus tôt, avant que je n'intervienne.

"Vous feriez mieux de déguerpir avant que je ne m'occupe de vous emmener chez vos amis bien aimés les poulets."

Ils me regardent et se moquent de moi. Ils ne semblent pas avoir peur de moi. Un petit sourire perle sur mes lèvres. Ils voulaient jouer à faire les fiers. On allait bien voir qui c'est la boss. Le premier se lance sur moi et je le stoppe en levant la main, le frappant de plein fouet à la tête. Il chute sur le sol, douloureusement. Son collègue se jette sur Kingston. Usant de ma super-vitesse, je me place devant lui avant d'utiliser mon souffle-givrant pour le faire reculer de plusieurs mètres.

"Mais vous êtes stupides ma parole ! Je suis Supergirl, espèce de crétin !" énonçais-je à l'autre idiot alors qu'il venait de sortir une arme pour me tirer dessus.

M'approchant de lui, je lui mets une droite bien placée et il s'effondre sur le sol, inerte.

"Bon, venez avec moi, on devrait pas rester là. Leurs copains vont pas tarder à arriver et pas que ça me gène mais j'avais prévu autre chose que me servir de mes poings ce soir" lâchais-je "Vous leur avez-fait quoi pour qu'ils vous attaquent comme ça ? Mise à part être imbu de vous-mêmes et un très mauvais présentateur JT?" énonçais-je alors avec un grand sourire.

A priori, la super-héroïne ne semble pas être une fan du présentateur, ce qui laisse Caleb quelque peu dubitatif et surpris. Tout le monde l'aime en général ! Ou fait semblant de l'aimer du moins ! C'est une première des plus déstabilisante pour le blond, qui ne sait quoi en penser.

Après avoir mis au tapis tous ses assaillants avec une facilité déconcertante, sans même un cheveux de travers, elle se rapproche de lui, un énorme sourire aux lèvres. Et l'insulte comme si de rien n'était ! Lui, un mauvais journaliste ?! Comment ose-t-elle ? Scandalisé et profondément outré, il la regarde de haut en bas, le regard accusateur. A y réfléchir, il préfère encore se faire kidnapper que d'entendre de telles calomnies.

Un mauvais journaliste ?! De qu-- c'est Eleanor qui vous a lavé le cerveau c'est ça ?!

Eleanor, sa bête noire et sa pire ennemie. Rivale du journal télévisé, tous deux n'ont jamais pu se supporter, toujours à chercher comment ennuyer le quotidien de l'autre sans arrêt, les idées ne manquant pas pour se pousser à bout l'un et l'autre. Il n'y a qu'Eleanor pour remettre son éthique et son professionnalisme en doute. Et ça, Caleb ne peut l'accepter !  

Imbu de lui-même ? Très certainement. Un mauvais journaliste ? Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre ! Caleb s'insurge.

Ne croyez pas un seul mot de ce qu'elle raconte !

Cette vipère ne perd rien pour attendre !

Mais Caleb n'a pas le temps de s'insurger bien plus que déjà d'autres voix s'élèvent tout près. Effectivement, il faut croire que la petite bande de criminels de bas étages a d'autres membres dans ses rangs. Et ceux-ci se rapprochent.

Mais soit, allons nous-en ! Inutile de rester dans cette ruelle plus longtemps.

Caleb ne se fait pas prier pour suivre Kara loin de la rue et des malfrats en question, déplorant toutefois le fait que sa chemise ait été abîmé dans la bataille ! Elle a une tâche ! En plus d'être froissée à plusieurs endroits. Quelle ignominie, vraiment.

Encore merci, c'est la moindre des choses, la politesse. Sa mère l'assassinerait s'il ne respectait pas les bonnes manières ! Mais vraiment, n'écoutez pas Eleanor ! Le blond ne s'est toujours pas remis d'un tel affront, scandalisé de tout son être. Qu'a-t-elle dit à mon sujet exactement ? En quoi suis-je un mauvais journaliste ?

Le présentateur se pose sérieusement la question, sans se douter une seule seconde que ce n'est pas Eleanor la fautive. C'est bien Kara, l'identité secrète de l'héroïne en face de lui, qui déplore son manque de talent journalistique.

Je n'étais clairement pas fan de Caleb Kingston. Je le trouvais imbu de sa propre personne. Par contre, j'appréciais grandement le journal du midi avec Eleanor Travers, elle, elle était une vraie journaliste. Un petit rire m'échappe avant que je ne pose mon regard sur Caleb.

"Je n'ai besoin de personne pour me faire mon propre avis Monsieur Kingston." énonçais-je alors avant de reprendre "Elle a raison sur certains points ceci-dit, mais je n'en dirais pas plus." ajoutais-je avec un sourire, amusée de la situation.

Oui c'était connu dans le monde du journalisme. Ils ne s'appréciaient pas. Ni l'un, ni l'autre et je savais par des connexions au sein du JT que l'objectif de l'un et de l'autre était de pourrir au maximum le travail de l'autre et je savais donc de qui parler pour leur faire chauffer un peu.

"De rien, c'est mon travail." repris-je quand il me remercie.

Un petit rire m'échappe.

"Je vous l'ai dit, je me fais mon propre avis sur la question." repris-je avant d'ajouter "Ce n'est pas avec elle que j'ai parlé mais avec une autre journaliste avec qui je m'entends bien." ce qui est vrai puisque dans un sens, cette journaliste, c'est moi aussi.

Me pinçant les lèvres, je finis néanmoins par reprendre la parole.

"Parce que vous n'êtes pas assez courageux pour donner votre propre avis sur les choses comme le font les vrais journalistes, vous vous contenter juste de relater des faits sans vous questionner sur la véracité des propos, vos reportages sont...enfin ce n'est jamais facile d'être un bon journaliste de toute façon." repris-je.

Sauf Eleanor qui elle a tout compris mais je vais me retenir de lui dire.

Eleanor semble donc bien avoir fait un lavage de cerveau à cette pauvre Supergirl, qui en vient à remettre en question l'intégrité du présentateur ! Et à priori, elle a des sbires de son côté, chargés de colporter des ragots en tout genre. Caleb est outré, bien qu'étrangement impressionné par sa collègue.

Si mes reportages ne sont pas à la hauteur, c'est sans doute la faute à ceux qui rédigent le téléprompteur. Ou à Eleanor, qui fait tout son possible pour me mettre des bâtons dans les roues. Je ne serais même pas étonné que tous deux se liguent contre moi, d'ailleurs. Ils cherchent à me décrédibiliser le plus possible.

Il devra se méfier de Thomas à l'avenir ; il a toujours su qu'il n'était pas digne de confiance. Les prochains téléprompteurs seront relus par Caleb désormais, juste par précaution.

Sachez que je fais toujours mes recherches en amont, mais il semblerait que le directeur de la chaîne n'apprécie pas lorsqu'on cherche à imposer son propre avis sur la question.

Non, Caleb ne se remet jamais en question. A quoi bon ? Ce n'est, de toute façon, jamais de sa faute. Ce sont les autres qui ont tort, et qui cherchent à tout prix à faire de lui leur bouc émissaire, en lui donnant une réputation de mauvais journaliste. Caleb en est toujours tout autant indigné, retenant un soupir de protestation face à de telles remarques. C'est une attaque à sa dignité et à sa réputation, voilà tout !

Par le plus grand des hasards, je me suis toujours demandé. Pourquoi rouge et bleu pour le costume ? Ne vous méprenez pas, ce sont de très jolies couleurs. Elles sont simplement très... tape à l'oeil. Surtout quand on les mélange.

Est-ce là une façon polie de lui indiquer qu'un tel accoutrement est des plus démodé et ne met pas du tout en valeur son héroïsme ? Oui, tout à fait. Caleb a toujours été des plus honnêtes - parfois même un peu trop - mais il sait également pertinemment que Supergirl est en mesure de le réduire en morceaux à l'aide de son petit doigt seulement. Alors il retient son snobisme un maximum, un air intrigué sur le visage.