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My Life Is Going On... Ft. Anibal

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Daniel Ramos

Daniel Ramos

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MessageSujet: My Life Is Going On... Ft. Anibal My Life Is Going On... Ft. Anibal EmptyMar 20 Fév 2024 - 16:42


   
(( My Life Is Going On... ))

   
Dos à la foule. Accoudé au bar, Denver noyait son affliction dans des tord-boyaux joliment dressés. Ses phalanges massaient la paume de sa main ankylosée et contusionnée par son précédent affrontement. Sans Moscou pour réfréner son impulsivité et le cadrer en cas d’égarement, il dérivait dans ses vices. Hormis ce mouvement répétitif, seul, ses yeux clignaient, fixant un point invisible devant lui, absorbé par diverses pensées sombres. Cette douloureuse perte revenait, encore et toujours, tourmenter cette psyché fragilisée.

Plus l’alcool s’accumulait dans son organisation, plus cette tragédie s’ancrait et le torturait. Une certaine complémentarité, aussi grisante que malsaine, naissait. Un bref rire s’échappa de ses lèvres… Ce désarroi était l’unique chose qu’il lui restait de son père… Cette lancinante et oppressante douleur, qu’aucun mot ne parvenait à décrire, lacérait son âme, lui arrachant quelques sanglots étouffés. Inconsciemment, il refusait d’abandonner ce souvenir douloureux. Il s’imaginait qu’accepter sa mort le conduirait indéniablement à l’oublier… Alors, il s’engourdissait dans cette complaisance. Un pan de son esprit, conscient de cette déchéance, lui intimait d’arrêter ses conneries. Qu’importe les appels, Denver préférait les ignorer en grommelant divers jurons incompréhensifs dans sa barbe. Une voix réconfortante vint parasiter son esprit. « Mi hijo… » Écho lointain accompagné d’une main posée sur son épaule. Les sons se mélangeaient. La réalité devenait fiction et la fiction devenait réalité. « Non. » Son poing se referma. La douleur était acceptable, mais ce qu’il se passait à cet instant restait intolérable ! Hors de sa bulle, une frénésie gagnait le bar. À cause de ce remue-ménage, son hallucination s’estompait. Malheureusement, l’ombre de Moscou s’accrochait et continuait de l'agiter. Ses doigts s’enfoncèrent dans son cuir chevelu et l’agrippèrent avec hargne. Ses yeux se fermèrent. Denver luttait contre ses démons. La bataille fut abrégée lorsqu’un jeune homme surgit brutalement. Dans sa chute, il s’étala sur toute sa longueu, renversant au passage son verre sur son pantalon.

Clignant vivement des yeux, il n’eut le temps de corriger cet avorton, qu’il fila tel un cafard entre les clients de l'établissement. Son sang ne fit qu’un tour, abandonnant principe et raison. Cette violence était un moyen pour lui de renouer complètement avec la réalité. « Reviens là ! » Éméché, il s’élança à sa poursuite, bousculant sur son passage d’autres hommes. La bagarre se profilait à l’horizon, gorgeant son corps d’adrénaline. Malheureusement, il n’atteignit pas sa cible. Un groupe l’empoigna par les épaules pour le bazarder contre une table. Son équilibre, défaillant à cause de l’alcool, l’empêcha de se rattraper. Mordre la poussière ne faisant pas partie de ses habitudes, il se releva et se retourna vers ses assaillants. « Où cours-tu comme ça  ? Regarde où tu vas, pauvre con ! » Agressive et provocatrice, la voix d’un inconnu s’éleva. Ses iris toisèrent l’homme entouré de deux autres individus. Incapable d’aboyer seul face à un adversaire, il eut l’idée de venir s'entourer de sa meute. Sourire aux lèvres, Denver se redressa. « Qu’est-ce qu’il y a de drôle, connard ? » Désarçonné par la désinvolture de leur adversaire, le groupe d’hommes s’observa. « Je vais te faire passer l’envie de sourire ! » À cette énième provocation, le rire distinctif et bruyant de Denver s’éleva. Il connaissait ce type de profil. Seul, le courage leur faisait défaut. En groupe, leur audace était décuplée. Toutefois, il subsistait une faiblesse ! Si l’un d’eux tombait, le reste du groupe suivait. « Vous tombez foutrement bien ! » Agacé par ce bavardage, il bondit sans crier gare sur l’un d’eux. Immédiatement, son poing s’écrasa sur la tempe de son adversaire. La violence fut telle qu’il perdit l’équilibre et se retrouva à genou devant Denver. Animé par la rage, il n’en démordit pas ! Son acharnement se poursuivit sur ce dernier. Chaque coup était libérateur et l’ancrait davantage dans cette réalité austère qu’il cherchait à fuir la plupart du temps.

La clientèle du bar, agglutinée autour d’eux, n’osait pas intervenir. L’hémoglobine suintait. Son visage maculé par le sang ne l’arrêtait pas. Au milieu de toute cette confusion, une voix interpela Denver. Comment pouvait-il être là ? Non, c’était impossible. Ses cris réussirent à l’extirper de cette frénésie l’espace d’un instant. Son regard croisa le sien. « Rio ? » Souffla-t-il, totalement abasourdi. Cette seconde d’inattention lui fut fatale. Le poing de son agresseur fila jusqu’à son nez. Un craquement sourd retentit. Denver bascula en arrière et son dos percuta férocement le bitume du bar. Sa main se porta à son nez. « Eres un hombre muerto, hijo de puta ! » Effectivement, il valait mieux pour lui disparaitre du champ de vision de cet animal, s’il n’avait pas envie de mal finir. Pour stopper cette bagarre, les serveurs retenaient ses assaillants comme ils pouvaient. Comment pouvait-il être devant lui ? Cette révélation, couplée à son ahurissement, l’empêcha de bouger. L’envie d’abattre son adversaire n’était plus qu’un vulgaire souvenir sans importance. Ses iris se contentaient de le fixer. « Joder... De verdad estáis aquí ? » Peina-t-il à articuler, à cause de la douleur. « Coño ! Cómo llegaste aquí ? »

   
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Aníbal Cortés

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MessageSujet: Re: My Life Is Going On... Ft. Anibal My Life Is Going On... Ft. Anibal EmptyJeu 22 Fév 2024 - 3:54



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Retrouver ses souvenirs avait été une expérience particulièrement déstabilisante pour Aníbal. Bien que celui-ci ait très rapidement compris que des coïncidences étranges pouvaient davantage survenir ici que dans tout autre endroit où il avait pu mettre les pieds jusqu'alors, retrouver l’une des personnes avec qui il avait passé le plus clair de son temps au cours de ces derniers mois n'était pas quelque chose qu'il avait vu venir. Bien évidemment, il avait fait ses recherches dès l'instant où la mémoire lui était revenue afin de trouver la moindre bribe d’information au sujet des autres braqueurs. Au départ, ça avait simplement été dans le but de s'assurer que leur réputation ne les avait pas suivis jusqu'ici : bien que particulièrement fier de presque tout ce qu'ils avaient pu accomplir en Espagne sur le moment, les circonstances mystérieuses par lesquelles il s'était retrouvé ici avaient laissé l'espagnol quelque peu sceptique. L'abominable impression d'avoir fait tout cela pour strictement rien ne le quittait pas : à quoi bon devenir l'un des ennemis publics numéro un et perdre autant si la richesse promise n'était même pas au rendez-vous ? Finalement, le concernant en tout cas, rien n'avait véritablement changé par rapport à la vie qu'il menait avant le braquage. Exception faite qu'il ne retrouverait jamais ses parents, probablement restés là-bas et incapables de lui pardonner même s'ils se trouvaient ici. Désormais, il pouvait presque se considérer comme un orphelin exception faite qu’aucune maladie ou accident ne lui avait ôté ses parents, uniquement ses propres actions. Lui qui avait, comme beaucoup d'autres personnes, longtemps craint l'effet d'une maladie quelconque comme on en entendait parler dans toutes les familles n'avait même pas eu besoin de cela pour que la sienne n'éclate : ses mauvais choix l'y avaient conduit.

Lorsqu’il s’était engagé auprès du Professeur, celui qui avait très rapidement acquis le surnom de Rio auprès de ses pairs avait imaginé la situation comme un véritable terrain de jeu grandeur nature. Une occasion de démontrer ses facultés en situation réelle tout en obtenant une rémunération plus importante que toutes celles dont il aurait pu rêver, aussi ambitieux et talentueux puisse t-il être dans son domaine de prédilection. Tout avait semblé simple, de prime abord : un casse efficace avec un plan solide, des personnes compétentes et un gros pactole à la clé. Sauf qu’évidemment, il avait fallu que ces fichus sentiments rentrent en ligne de compte. Très vite, la première règle établie par le cerveau de l’opération avait été bafouée et oubliée alors qu’il s’était lancé dans une relation personnelle particulièrement passionnée avec l’une de ses collègues. Bien qu’il ait passé les meilleurs moments de sa courte vie aux côtés de la brune et qu’il n’en regrettait pas la moindre seconde, la manière dont tout s'était terminé lui laisserait probablement éternellement un goût amer. Une partie de lui aurait pu simplement se convaincre que ce n'était de toute façon jamais destiné à durer et que toute cette ébauche était vouée à mal se terminer depuis le début, mais il n'y parvenait pas. Tout aurait pu si bien se passer si le destin ne s'était pas ouvertement positionné contre eux, mettant sur leur route toutes les embuches possibles et imaginables. Preuve en était que même si tout le monde avait perdu des êtres chers au cours de ces deux événements, il était finalement le seul à avoir survécu sans que personne ne soit susceptible de l'attendre à la sortie : plus de famille, plus de conjointe et pas d'enfants. La solitude la plus totale. Combien de temps arriverait-il encore à se convaincre que tout finirait par s’arranger ? Lui-même n’en avait absolument aucune idée.

Les traumatismes liés à tout ce qu'il avait pu vivre là-bas auraient pu le convaincre de faire en sorte que cette partie de sa vie reste aussi loin que possible de lui désormais mais ça non plus, le madrilène n'y était pas parvenu. Sa sortie de ce soir était pourtant supposée l'aider, le faire penser à autre chose. Et, au début, il pensa sincèrement avoir réussi : un cocktail un peu trop alcoolisé disposé sur sa table qui n'était pas le premier de sa soirée, il ne lui en faudrait pas beaucoup plus pour perdre l'esprit et ses regrets par la même occasion. Le conflit ayant éclaté entre plusieurs hommes, certainement alcoolisés, aurait même dû lui servir de distraction supplémentaire — si une voix ne s'était pas distinguée. Cet accent combiné à cette agressivité n'auraient jamais pu appartenir à une autre personne que... « ¿ Denver ? » Son visage naturellement trop expressif affichait clairement le choc que ces retrouvailles lui créaient au point où, l'espace de quelques secondes, il en accusa son taux d'ébriété qui était finalement peut-être plus avancé qu'il ne l'avait pensé. Une énième hallucination comme il lui arrivait d'en faire plutôt deux fois qu'une depuis son arrivée, certainement. Que ce soit lui plutôt qu'une des personnes ayant péri au cours du braquage qui revenaient régulièrement le hanter depuis était toutefois inattendu, ce qui lui mit la puce à l'oreille.  Ca, combiné au mauvais coup qu'il se retrouva à encaisser par sa faute — ou plus exactement par la faute de la distraction qu'il avait momentanément représentée.  « ¡Denver, joder ! » S'exclama t-il, le poing que le nez de son ancien comparse venait d'encaisser suffisant à le sortir de sa torpeur. En quelques enjambées, il se pressa auprès de lui tandis que le soudain éloignement des protagonistes de tout ce foutoir sembla motiver d'autres clients du bar à s'interposer pour éviter que la bataille ne reprenne de plus belle. « Por mucho que la fractura que este golpe parecía anunciar... » Un maigre sourire désolé étira ses lèvres, ne pouvant s'empêcher de songer que tout ça était partiellement sa faute. Précautionneusement, son index et son pouce vinrent positionner son visage de sorte à pouvoir en examiner plus aisément les évidents dégâts, sa question interrompant toutefois sa concentration. « Esperaba que supieras más sobre esto que yo. »  Mais visiblement, ils n'en étaient pas plus avancés l'un que l'autre dans le domaine. Aujourd'hui ne leur apporterait pas toutes les réponses qu'ils avaient potentiellement brièvement pu espérer obtenir. « La mejor manera de describirlo es simplemente decir... ¿sucedió? » Pourtant, ce n'était pas le mystère qu'il avait le plus envie d'élucider actuellement. Les sourcils froncés, il laissa échapper un soupir dépité.  « ¿Crees que está roto? »


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Daniel Ramos

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MessageSujet: Re: My Life Is Going On... Ft. Anibal My Life Is Going On... Ft. Anibal EmptyVen 12 Avr 2024 - 12:36


   
(( My Life Is Going On... ))

   
Le coup de poing donné par l’un des antagonistes lui confirma que Rio n’était en rien une hallucination construite de toute pièce par son esprit. Si cela était le cas, la violence du coup aurait immédiatement dissipé l’image du jeune homme de son champ de vision, pourtant il demeurait bien existant. Combien de fois avait-il souhaité retrouver, ne serait-ce qu’un des membres de l’équipe de braqueurs créée par le professeur ? Impossible de les compter… Depuis le retour de ses souvenirs, il n’avait cessé d’espérer de retrouver l’un d’eux. Âme en peine, Denver ne supportait pas cette solitude imposée par cette nouvelle vie. Il n’en avait jamais voulu… Depuis son enfance, ce dernier avait toujours été entouré par sa famille ou ses amis, alors un tel manque d’interaction social pesait sur son mental. Une psyché fragilisée par les derniers évènements qu’il avait vécus à la Banque d’Espagne ! D’ailleurs, fait du passé qu’il préférait taire et oublier… Il savait parfaitement qu’il aurait dû subir le même traitement que ses compères. Cependant, la présence inattendue de Rio lui prouvait qu’il n’était pas mort après sa sortie de la banque. La douleur fut un autre moyen pour lui de concrétiser l’existence de celui qu’il considérait comme son frère d’armes. Après la souffrance, ses narines s’engorgèrent d’un liquide poisseux. L’hémoglobine ne tarda pas à s’écouler le long de sa muqueuse. Instinctivement, sa main se porta à son visage. D’un revers de la main, il épongea son philtrum. Son adversaire ne l’avait pas raté ! Le flux sanguin ne tarderait pas à devenir plus conséquent et à ce moment-là une simple pression ne parviendrait pas à stopper le saignement. Habitué à ce genre de situation, il garda son calme.

Le deuxième braqueur ne tarda pas à le rejoindre pour l’ausculter. Les cours d’anatomie et de médecine du Professeur servaient à l’instant même… Des cours que Denver n’avait pas spécialement suivis, estimant que toute cette théorie n’était pas faite pour lui ! Effectivement, Daniel n’était pas le mieux placé pour les activités minutieuses et intellectuelles… Cet homme était plus pour l’action, l’exemple parfait de l’impulsivité. Fort heureusement pour lui, Rio avait davantage écouté durant les cours. En dépit de la douleur, sa respiration nasale restait normale, malgré l’encombrement que procurerait l’hémoglobine. Un signe valable qui lui annonçait que le coup n’avait provoqué aucune fracture. « ¡Ese gran hijo de puta, es un hombre muerto! » Pestiféra-t-il avec hargne entre ses dents. Homme avec une certaine fierté, Denver retira sa tête d’entre ses doigts. « ¡Estoy bien! » Lâcha-t-il en feignant une légère grimace à cause du recul trop abrupt. Il lui fallut quelques secondes pour se ressaisir. Malheureusement, tout comme lui, il ignorait les circonstances de leur apparition sur cette ile… Si même le petit génie de la bande ne comprenait pas ce phénomène surnaturel, il était évident que Daniel serait dans l’incapacité la plus totale de le déchiffrer. « Et les autres ? Tu les as croisés ? » Demanda-t-il sans grand optimisme. Après autant de temps sans nouvelles, il avait fini par perdre espoir. « ¿Sucedió? » Cette explication avait le mérite d’être extrêmement claire, peut-être légèrement simpliste, mais Rio avait raison. Il n’avait pas meilleure explication que celle-là. Les choses s’étaient simplement produites… L’adrénaline redescendue, les idées de Denver redevinrent plus claires. Rio ne pouvait pas être là… La dernière fois qu’il l’avait vu, il était mort ! Comment est-ce possible ? « ¡Espera! ¡Espera! ¡Espera! Comment peux-tu être en vie ? Je vous ai vu, toi et les autres, mort… ¡Carajo! Vous étiez dans des putains de sacs mortuaires. Ça, c’est également produit ? Comme ça… Sans raison ? » Si la première fois, l’explication avait passé. Cette fois-ci, l’ancien braqueur peinait à comprendre comment un mort pouvait ressusciter.


Si la priorité de Rio se tournait vers une potentielle facture de son nez. Lui, restait indéniablement ancré sur sa résurrection, tentant vainement de trouver une explication rationnelle à ce foutoir. Il avait beau creuser, toute justification restait tout bonnement impossible ! Hélas, l’écoulement sanguin reprit, avortant cette réflexion. « ¡Mierda! » Pesta-t-il en portant une main à son nez afin de contenir au maximum le saignement. Vivement, il se redressa, empoigna grossièrement quelques serviettes en papier disposées sur l’une des tables et se précipita vers les toilettes de l’établissement. Devant le lavabo, il tentait en vain de stopper l’écoulement, mais il s’y prenait mal. Alors qu’il grommelait entre ses dents diverses insultes extrêmement fleuries, il entendit le plus jeune arriver. « J‘en sais foutrement rien de si c’est fracturé ou non, mais bordel cet enfoiré m’a pas loupé. » Rancunier, il n’aspirait qu’à une chose concernant cet individu : le retrouver et lui rendre la monnaie de sa pièce. Cependant, pour l’instant, il devait se soigner. « Y tú... Aún estás aquí. » Souffla-t-il, soulagé de constater que son esprit ne se jouait pas de lui. Oui, Denver ne concevait pas qu’il puisse être réel, pas après ce qu’il avait vu. Après un soupir résigné, il s’aventura sur ce chemin épineux. « Rio… Comment t’as pu survivre ? » Sa tête, toujours au-dessus du lavabo rougi par son hémoglobine, ne bougeait pas, le filet de sang qui coulait par intermittence de ses narines ne lui permettait aucun mouvement. « Comment !? »

   
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MessageSujet: Re: My Life Is Going On... Ft. Anibal My Life Is Going On... Ft. Anibal EmptyMer 17 Juil 2024 - 2:39



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L’ancien « Rio » aurait presque dû le sentir venir : dans quel autre type de contexte aurait t-il pu retrouver Daniel qu’au beau milieu d’une bagarre de bar ? Bien que n’ayant jamais eu l’occasion de le fréquenter en dehors des frasques les ayant réunis, il estimait avoir réussi à dresser un portrait plutôt fidèle de son ancien acolyte au fil du temps. Son impulsivité n’avait pas tardé à se montrer, s’intensifiant d’ailleurs avec le temps. Certes, il y avait eu une ou deux prises de bec entre eux au cours du premier braquage mais rien de comparable à celles du second. Le plus jeune ne pouvait pas l’en blâmer : si la perte de Moscou avait déjà fortement affecté le moral des troupes en tant que simples coéquipiers, ce n’était toutefois en rien comparable à ce qu’il avait dû ressentir en tant que fils. Lui-même se rappelait de la douleur ressentie d’avoir été renié par ses parents en ayant pourtant su que c’était ce qui lui pendait au nez en s’engageant dans cette folle épopée. Profondément honteux, peut-être un peu lâche et profitant égoïstement des deux ans ayant suivi en compagnie de sa dulcinée, il n’avait jamais tenté de renouer mais ça ne signifiait pas pour autant qu’il ne pensait pas à eux. Alors par conséquent, il ne pouvait que vaguement tenter d’imaginer ce qu’avait pu vivre son ami. Pendant un instant, alors que son regard inquiet scrutait son visage à la recherche d’hypothétiques dégâts autres que son nez dont le saignement prouvait à lui seul son atteinte, il eut une pensée pour Monica. Loin d’être en position de pouvoir jouer les conseillers matrimoniaux compte tenu du niveau de toxicité contenu dans sa propre relation de l’époque, il ne les avait jamais imaginés pouvoir durer sur le long terme. La suite lui avait donné raison, au même titre que les discussions qu’il avait pu avoir avec la blonde. Hélas, les complications rencontrées dans leur mission l’avaient empêché de pouvoir se montrer aussi présent qu’il l’aurait souhaité pour celui qu’il pouvait presque qualifier de frère d’armes. Aujourd’hui représenterait peut-être sa rédemption.

Là où lui-même aurait probablement été un peu sonné par le coup qu’il venait d’encaisser, ce n’était définitivement pas le cas du second espagnol. Celui-ci semblait au contraire encore plus en rage, ce qui, en dépit de la grimace qu’il esquissa, ne surprit pas celui qui tentait alors de s’improviser infirmier. « Deja de revolver, joder ! » S’impatienta t-il en échappant la prise exercée autour de son menton face au mouvement trop brusque de l’entêté lui faisant face. Putain de fierté mal placée. « Tu ne feras rien du tout. » La réprimander dans le but de l’empêcher d’agir n’avait jamais été très efficace mais, estimant à titre personnel avoir prit pas mal de plomb dans la cervelle (au sens littéral du terme, ce qui était déjà mieux que d’autres de leurs anciens compères) depuis leurs dernières péripéties, il espérait naïvement qu’il en soit de même pour lui. Quelle erreur. Malgré son agacement lié à cette éternelle envie de bien faire, le plus jeune capitula pour l’instant quant à l’examen des blessures de guerre du plus âgé, espérant que celui-ci se montrerait un peu plus conciliant une fois sa curiosité quant aux événements passés rassasiée. « Non. Je n’ai eu de nouvelles d’absolument personne. » Admit t-il, la voix momentanément remplie de regrets, avant de poursuivre. « Je ne m’y attendais plus à quoi qu’il en soit. Cet endroit est vraiment… étrange. J’ai même cru que je perdais totalement la tête, au début. » Un sourire nerveux étira ses lèvres à cette pensée alors qu’il songea ne pas encore être totalement assuré du contraire. Chance pour lui, le geek n’eut pas le temps de s’attarder sur ce type de ruminations alors que, petit à petit, les faits l’ayant conduit là lui revenaient à l’esprit. Là où n’importe quel autre membre de son équipe aurait su de quoi il en retournait, Denver, alors isolé lors des derniers événements, ne pouvait qu’être profondément confus. « C’est… plus compliqué que ça. Ça faisait partie du plan, en quelques sortes. » Ou en tout cas, c’était la meilleure solution ayant été envisagée pour leur permettre de sortir sans avoir à rendre des comptes publiquement sur cette histoire d’or devenu laiton.

Estimant que le beau milieu d’un endroit où ils venaient tout juste d’attirer l’attention n’était pas le plus approprié pour avoir une discussion de cet acabit, Anibal ne se fit pas prier pour le suivre jusqu’aux toilettes. Décidément pas l’endroit où il s’imaginait avoir une discussion de ce type mais… ça ferait davantage l’affaire que celui où ils s’étaient initialement trouvés. « Et je suppose évidemment que tu vas être raisonnable et aller consulter un médecin pour en vérifier le véritable état ? » L’intonation ironique de sa voix prouvait qu’il n’y croyait pas le moins du monde : Denver était le cliché parfait du mâle convaincu que sa virilité résidait en bonne partie dans le fait de ne démontrer aucune faiblesse. Consciente du tempérament auquel il avait affaire, il décida raisonnablement de ne pas encore trop insister sur le sujet. Vu le temps qu’il lui fallait habituellement pour redescendre et la tension accumulée lors de sa prise de bec d’il y a seulement quelques instants, l’informaticien préféra assouvir sa curiosité avant toute chose. Peut-être serait t-il un peu plus ouvert à la suggestion une fois certains de ses doutes soulevés… « Je ne sais pas te mentir c’est… ça a été tendu. » Et jusqu’à la dernière minute, chacun d’entre eux s’était imaginé finir avec une balle entre les deux yeux. Tamayo semblait si enragé et désireux d’en terminer avec cette affaire ayant prit une ampleur qui lui laisserait des marques indélébiles à vie qu’il n’aurait même pas été contre une transgression supplémentaire vis-à-vis de la loi. Lui-même était aux premières places pour le savoir. « C’est ce qui a été décidé pour nous faire sortir de la banque. L’idée était de faire penser à tout le monde que nous étions morts pour limiter l’humiliation publique… et tu étais censé être mis au courant pour que tu puisses nous rejoindre. » Ses sourcils se froncèrent alors qu’hélas, il en venait à réaliser que rien ne s’était décidément passé comme prévu. Hésitant l’espace d’une seconde, il prit le temps de s’humidifier nerveusement les lèvres avant de continuer. « Tu… Et toi, qu’est-ce qu’il s’est passé de ton côté ? De quoi te souviens-tu ? Ça fait longtemps que tu es ici ? »


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MessageSujet: Re: My Life Is Going On... Ft. Anibal My Life Is Going On... Ft. Anibal EmptyDim 11 Aoû 2024 - 20:15


   
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Le calme n’avait jamais fait partie de Denver… Il l’avait prouvé à mainte reprise lors des deux braquages, qui les avaient unis, et le démontrait encore aujourd’hui. Certes, au fil des années, il avait réussi à légèrement se défaire du spectre pernicieux de la violence et à être un homme plus réfléchi et moins impulsif, mais il était loin de s’en être débarrassé ! Sa tête recherchait avec frénésie ses agresseurs, fuyant les phalanges de Rio. « Tu ne feras rien du tout. » Qu’il crût ! Peut-être qu’aujourd’hui ou demain, il ne fera rien, mais il comptait bien obtenir sa vengeance – comme avec tous ceux qui avait eu le malheur de s'en prendre à lui.

Personne d’autre n’était parvenu dans cet étrange monde… La simple présence de Rio lui prouvait le contraire. S’il se trouvait devant lui, il y avait une infime possibilité que les autres braqueurs soient également dans cette ville, il suffisait de les trouver. Cette idée réchauffait quelque peu son cœur lourd de remords. Si pour l’instant, il tut son ressenti sur les autres. Il haussa un sourcil interloqué par ses paroles. « Ne m’en parle pas… » Ce sentiment, il ne l’avait connu que trop bien… Dès qu’il avait retrouvé ses souvenirs, sa vie ne fut qu’une impitoyable descente aux enfers. Aucune expérience ne préparait un homme à la mort de son père, et cela même après des années… Cette douloureuse expérience, il l’avait subi une deuxième fois, larmoyant et maudissant l’univers tout entier de l’avoir épargné. Mort, il n’aurait jamais revécu cette détresse ! Dans ses moments les plus vulnérables, il s’imaginait trépasser, s’engouffrer dans ce néant calme et indolore que le voile de la mort lui offrirait. Ce désir de mise à mort avait redoublé en intensité quand ils s’étaient rappelé la mort de ses camarades… Comment oublier l'exécution de Nairobi ou encore le sacrifice de Tokyo. Des pertes, qu’ils auraient pu éviter si Gandia avait été neutralisé comme Berlin l’avait suggéré – un mal que Sergio avait refusé. Malgré ces horreurs, un autre évènement se rajouta à cette vie ravagée : la tuerie des autres membres restants. Voir défiler un à un les sacs mortuaires, présumés contenir les corps de ses amis, l’avait plongé dans un profond tourment. Tout cet enchainement avait été difficile à accepter pour Daniel et continuait de l’être. Alors à l’entente de ses paroles, ses sourcils se froncèrent, sclérosant son visage dans une profonde incompréhension. Tout ceci faisait partie du plan ? Cette information aurait dû le rassurer, l’ôter d’un poids. À l'inverse, elle éveilla en lui un profond sentiment d’injustice et de rancœur. « Partie du plan ? » L’amertume accompagnait ses mots. À cet instant, il n’avait qu’une envie : emmerder ce foutu plan. Ce jour-là, il avait tout perdu ! L’affliction que ce plan avait provoquée écrasait sur cette pitoyable excuse. Fort heureusement pour Le Professeur, il n'était pas en face de Ramos. Dans un élan d’impulsivité, il lui aurait sauté à la gorge. « Que se joda su plan ! » Pesta-t-il entre ses dents. Cet amalgame de ressenti négatif et ce sentiment d’injustice profonde n’eurent pas le temps d’imploser et d’atterrer ce pauvre Rio, sa blessure l’extirpa de cette impasse.

Penché au-dessus du lavabo, l'hémoglobine s’écrasait au compte-goutte sur la céramique jaunie par le temps et sans doute par un entretien médiocre. Au travers du miroir, ses iris sévères le fusillèrent. Il était hors de question qu’il aille consulter pour un saignement, qu’il jugeait bénin. S’il avait survécu jusqu’à présent, il survivrait à une telle balafre. Inutile de préciser que sa fierté mal placée jouait énormément dans la balance. Puis, un tout autre élément accaparait désormais son attention : la vérité derrière cette mascarade. Au cours des explications, Denver le fixait avec intensité. Tendu par son altercation, ces mots ne parvenaient pas à l’apaiser, au contraire. Au plus profond de son être, ses émotions se battaient. Comme une Cocotte-Minute, la pression s’emmagasinait au fur et à mesure. Poings fermés, ses ongles s’enfoncèrent dans la paume de ses mains. « Censé être mis au courant pour je puisse vous rejoindre ? » Répéta-t-il avec ironie. Est-ce qu’il arrivait à réaliser l’ampleur de la situation ? « Qu’est-ce qu’il s’est passé de ton côté ? » Un rire sans humour franchit ses lèvres. De son côté, il n’avait pas eu la même chance que lui. Brutalement, sa main empoigna férocement le col de son vêtement pour le faire taire. Son bras le força à se reculer jusqu’à ce que son dos heurte l’une des portes des cabines. « ¿Por mi parte? » Répéta-t-il faussement amusé. Son poing se pressait davantage contre son sternum. « Je me suis souvenu que j’avais perdu mon père… » Sa voix défaillit légèrement, mais elle se ressaisit aussitôt. « Que Nairobi est morte par notre faute… Que Tokyo est morte également. Qu’après l’arrivée de ce fils de pute, ils m’ont sorti de la banque pour voir le reste de ma famille sortir dans des sacs mortuaires. » Il marqua une pause le laissant digérer chacun de ces mots. Toutefois, son attitude n’annonçait rien de bon… « ¿Cómo crees que me siento? » Cracha-t-il entre ses dents, la mâchoire crispée.

Incapable de contenir ses émotions plus longtemps, Denver se laissa aller à son impulsivité. « Tu crois que je me sens comment, en croyant avoir tout perdu, hein ! » À chacun de ses mots, hurlés avec violence, son poing s’abattit avec force contre la maigre cloison des cabines, la faisant trembler. Au moins, il eut un certain sang-froid pour ne pas lui refaire le portrait. Après cette agression inouïe, Daniel tenta de se calmer et le repoussa avec fermeté. « ¡Joder! » Lâcha-t-il en essuyant son nez d’un revers de la main. Cette accalmie était encore fragile… À tout moment, l’ancien braqueur pouvait repartir dans ses travers.

   
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Aníbal Cortés

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Raisonner avec quelqu’un d’aussi impulsif que Denver était un exercice ardu. Tokyo était déjà ce que Rio lui-même aurait décrit comme une bombe à retardement – un innovant mais menaçant prototype ayant plusieurs fois feinté de lui exploser au visage avant de finalement le faire pour de bon d’une manière qu’il n’avait pas anticipée. Denver, quant à lui, était à ses yeux au moins aussi prévisible que la brune. Peut-être sa jeunesse l’avait t-elle forcé à être particulièrement naïf mais jamais n’avait t-il imaginé que les conséquences de l’aventure dans laquelle ils s’étaient tous engagés seraient aussi punitives. Évidemment, l’informaticien avait maintes fois assuré le contraire au chef des opérations lorsque celui-ci lui avait exprimé ses doutes, ayant même fut un temps souhaité le retirer intégralement des opérations. D’une certaine façon, il avait même réussi à se tromper lui-même en se convaincant qu’il mesurait pleinement les risques et acceptait de les courir. À vrai dire, il n’avait jamais pensé craindre la mort jusqu’à son propre emprisonnement. Certaines complications liées au premier braquage avaient été suffisantes pour l’effrayer et ce plus d’une fois mais presque à chaque fois, l’adrénaline et les plans aussi saugrenus qu’ingénieux du Professeur réussissaient à les tirer hors du trou qu’ils avaient eux-mêmes creusé. Les pertes d’Oslo, Moscou et Berlin avaient déjà été un premier retour brutal à la réalité mais, en dépit de la claque que ceux-ci avaient représentés à l’époque, ils ne lui étaient pas apparus comme étant personnels. C’était une façon profondément égoïste de raisonner mais, en fin de compte, la gravité de leur merdier ne l’avait frappé pour la première fois que durant son propre emprisonnement. Par la suite, les morts de Nairobi et Tokyo avaient renforcé cette prise de conscience au point où, en récupérant ses souvenirs à Baiame, il avait maintes et maintes fois espéré les perdre une nouvelle fois et ce définitivement. Denver, quant à lui, avait évidemment vécu les choses totalement différemment d’emblée. Comment aurait t-il pu en être autrement alors que son propre père avait été l’une des premières victimes à déplorer ?

La mort de Moscou avait changé le fils de ce dernier et tout le monde l’avait remarqué. Là où celui-ci avait longtemps été, en dépit de son tempérament volcanique, le compagnon de méfaits du plus jeune en étant même bien souvent celui qui installait une ambiance plus légère voir parfois même ouvertement amusante, sa personnalité était devenue plus… sombre. Chaque décision qu’il prenait semblait être ancrée d’une profonde colère, une colère contre l’univers tout entier que personne n’avait eu l’indécence de lui reprocher. Là où ils avaient autrefois semblé en osmose, les conflits entre eux avaient commencé à émerger. Et l’expression furibonde arborée par le plus âgé combinée à l’acrimonie audible dans sa voix, Aníbal ne les connaissaient l’une comme l’autre que trop bien. « Denver… » Tenta t-il d’ailleurs vainement de tempérer au premier signe de mécontentement exprimé par le concerné. Trop tard. Involontairement et avec la seule intention de lui apporter les réponses dont il avait besoin, le brun venait irrémédiablement de mettre le feu aux poudres.

Sans que lui-même ne s’en rende compte, avaler sa propre salive était devenu complexe. Chacun de ses mots lui paraissait désormais être considéré, disséqué et prêt à lui revenir en plein visage et c’était une sensation avec laquelle il était tout sauf confortable. La bouche cotonneuse, ce fut à la fois par sincère curiosité que par maladroite tentative d’apaiser le volcan semblant résider en son comparse qu’il en vint à lui demander le parcours de celui-ci depuis la dernière fois où ils avaient eu l’occasion d’interagir avant aujourd’hui. Quelle erreur ne venait t-il pas de commettre. Avant même d’appréhender pleinement ce qui se tramait, son dos rentra violemment en collision avec l’une des portes de cabine. Ses yeux ne se fermèrent que quelques secondes sous la brutalité du choc, s’empressant toutefois de les rouvrir par pur instinct de survie. Même instinct de survie qui l’empêcha de vouloir se rebiffer dans l’immédiat, la pression conséquente du poing de son désormais adversaire entravant quelque peu sa capacité à respirer correctement. Sa bouche s’ouvrit brièvement dans une tentative de l’interpeller à nouveau ou de le supplier de le relâcher, celui anciennement surnommé Rio n’en étant lui-même pas sûr, avant de se refermer sans avoir émit d’autre son qu’un grondement sourd reflétant plus d’inconfort que de colère. Il n’est pas dans son état normal, ce n’est pas réellement après toi qu’il en a et ça fait beaucoup à avaler, lui soufflait sa conscience, heureusement fidèle au poste. Pas suffisante hélas pour empêcher l’une de ses mains de se mettre à trembler de façon compulsive, son corps réagissant contre son gré à des traumatismes désormais anciens mais pas oubliés.

Les mots du plus âgé raisonnaient dans son esprit avec une brutalité inouïe en dépit de sa tentative de ne pas les prendre personnellement. Trop concentré à se morfondre sur ses propres malheurs et son propre deuil, il ne lui était jamais arrivé de se mettre à la place des autres membres de l’équipe auparavant. Aujourd’hui, c’était avec force que l’évidence le frappait en plein visage : chacun d’eux avait vécu son lot de tragédies. Tous ne restaient peut-être pas marqués par les mêmes choses et ne l’exprimaient surtout pas de la même manière mais la finalité était identique : ils n’avaient d’autre choix que de faire avec, portant le fardeau de leurs erreurs et des morts que celles-ci avaient parfois causés sur leur dos pour le restant de leurs jours. « Denver, je… » En dépit de ses quelques tentatives, la capacité de communiquer semblait lui être momentanément ôtée. L’émotion et la profonde tristesse qui envahissaient l’ensemble de son être l’empêchaient de céder à la colère à son tour, ce qui n’aurait de toute façon été que profondément contre-productif. La gorge nouée, son visage se contorsionna en une grimage incontrôlable alors que l’ensemble de son corps sursauta violemment face au coup de poing qu’il fut étonné de ne pas recevoir en plein visage mais, pour autant, l’espagnol ne s’écarta pas comme il aurait raisonnablement dû le faire une fois la prise de son ancien collègue relâchée. Contrairement à la première fois, il s’accorda une minute avant d’affronter à nouveau le spectacle face à lui. Sous ses paupières closes, il pouvait sentir l’humidité familière des premières larmes qui commençaient à se former contre sa propre volonté et il refusait de les laisser gagner du terrain. Comme s’il avait déjà été en mesure de les combattre… « Lo siento... lo siento mucho… » Finit t-il par balbutier d’une voix qu’il n’identifia pas tout de suite comme émanant de ses propres lèvres. Pour l’instant, il ignorait toujours ce que concernaient spécifiquement ces excuses : de ne pas s’être montré moins égoïste en tentant de comprendre ce qu’il avait pu ressentir ? D’avoir été, involontairement mais à cause de ses bévues, à l’origine de ce second braquage qui leur avait tant coûté ? De s’être trouvé là ce soir et de l’avoir empêché de se défouler pour oublier à quel point sa vie, au même titre que la sienne, était devenue un véritable foutoir ? Il n’en avait lui-même pas la moindre idée. « Ils me manquent aussi. Chacun d’eux. » Poursuivit t-il alors que sa gorge, étreinte par l’émotion, lui donnait l’impression d’ingurgiter de véritables lames de rasoir à chaque mot prononcé. « Il n’y a pas un jour, pas une nuit, où je ne pense pas à eux. Où je ne revois pas le regard figé de Nairobi ou… ce qu’il restait de Tokyo après... » Sa voix, déjà déformée, se brisa encore davantage à la mention de son ancienne petite-amie. « Sé que una disculpa ya no cambiará nada, pero... Lamento sinceramente que las cosas hayan resultado así. » Acheva t-il, ignorant à quel type de réactions il devait s’attendre cette fois mais officiellement prêt à assumer les conséquences. Peu importaient les reproches et peu importaient les coups qu’il devrait essuyer : ceux-ci ne seraient jamais aussi douloureux que sa propre conscience.



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