Look your dirty face. Ft Law

Tu souffles. Enfin.

Tu t’étais barrée du Metro-Hospital de con, avec un chef de service chaque jour un peu plus toxique. Il n’entend pas que vous êtes épuisés de vous occuper de sacrés cassos à longueurs de journée, qui ne comprennent pas que le service des urgences n’est pas un raccourci facile pour voir un médecin généraliste. Sans déconner, venir vous casser les pieds pour un rhume, alors qu’à côté de ça, vous avez un mec avec fracture ouverte à vous occuper. Franchement ? Tu inspires et tu balayes ces pensées de ton esprit, car l’heure est à la détente.
Surtout que toi, tu as un boulet supplémentaire à la cheville ; ton colocataire. Un boulet qui n’est présentement pas rentré et donc, tu as l’appartement pour toi toute seule jusqu’à ce qu’il se décide à crécher. Quand il n’est pas là, le calme est savoureux. Incroyable, mais vrai. Tu te demandes parfois si c’est un rêve ou une mauvaise farce. Si ce n’est pas une manière de te forcer à baisser ta garde, mais non. C’est bel et bien réel, alors autant en profiter.

La fin avait commencé à tirailler ton estomac, alors tu avais squatté la cuisine et tu as commencé à te préparer du riz pour faire des boulettes. Pendant la vapeur s’occuper de te le cuire, tu avais les mains dans le thon émietté et la mayonnaise, lorsque ton téléphone s’est mis à sonner. Tu as pesté, bien entendu ! Il n’y a pas beaucoup de monde dans cette ville qui possède ton numéro. À vrai dire pour le moment, ils ne sont que quatre ; Mugiwara amnésique, ton toi original, l’un des autres empereurs sur cette île et ton colocataire. Tu laisses sonner le temps de t’essuyer les mains et tu sors ton téléphone de la poche de ton jean. Tu décroches, tu mets en hautparleur et tu le poses sur le plan de travail pour reprendre ta popotte.

Tu ne lui réponds pas. Tu te contentes de le laisser parler et tu n’auras pas besoin de lui répondre, puisque la communication est coupée. Probablement par le flic qui l’a trainé jusqu’à sa cage à poule personnel.

Non, tu n’iras pas le chercher.
Tu pestes et tu râles de plus belles. Tu t’énerves même sur ces boulettes de riz que tu te prépares pour manger. Ça commence à bien faire, tu n’es pas sa mère, ni plein aux as. Tu en as ras-le-bol de payer ses cautions, alors tu comptes bien le laisser mariner en cellule. Au moins le temps que tu profites du silence de l’appartement pour manger, prendre une douche, regarder un film et seulement une fois que tu seras lassée de la solitude, tu iras peut-être le chercher. Tu fais tout ceci dans cet ordre et tu te félicites intérieurement de ta réussite. Tu as plutôt bien géré la préparation de ton plat favoris et ça apaise tes nerfs, on ne va pas se mentir. La douche gomme les dernières tensions qui crispaient tes épaules et finalement, c’est au beau milieu d’une série type thriller avec des gens aux facultés surhumaines plongés dans la paranoïa, que tu commences à t’ennuyer de son absence. Après tout à cette étape-ci d’une soirée classique, vous seriez déjà en train de vous bouffer le nez pour savoir quoi mettre. Or là, ça a été trop facile.

« J’le déteste. » Soupires-tu finalement, comme une façon d’admettre ta défaite.

Tu bouges de l’appartement en direction du commissariat où il est retenu, trois bonnes heures après son appel. Tu arrives les mains dans les poches, les épaules dénudées et ton bonnet-casquette léopard sur la tête. « B’soir, j’viens chercher l’emmerdeur. Zervos. » Tu ne fais pas d’efforts, parce qu’honnêtement, vu le nombre de fois où tu viens le chercher ici, vous êtes presque des habitués. Il manque la carte de fidélité. Le type de corvée de surveillance te regarde et soupire ; “Law, tu devrais le laisser tomber. Honnêtement. Ça va t’attirer des problèmes.” – « Je sais, mais je n’aime pas déléguer. Combien cette fois-ci ? » Tu restes impassible et floue sur tes motivations, parce que tu n’es pas capable toi-même de les expliquer. C’est le premier de votre monde que tu as retrouvé, alors tu imagines qu’il y a sans doute quelque chose à voir avec ta peur de la solitude. Un truc dans le genre. En tout cas une fois qu’il t’annonce le prix, tu te sépares à contre-cœur de ton argent en voyant s’envoler des mois de courses et quelques loyers, puis on te fait patienter.

Un temps où l’agent va chercher Leonidas dans sa cellule pour l’en faire sortir, non sans commenter : “T’as de la chance. J’en connais des comme toi, personne serait venu les chercher.” C’est trop vague et des petites frappes, ce n’est pas ce qui manque dans cette ville. Donc ça peut être tout et n’importe qui. C’est pour cela que son commentaire sonne très généraliste ; parce qu’il ne vise personne en particulier.

En tout cas tu ne l’attends pas trop longtemps, avant qu’on te le ramène. Tu es restée debout pendant tout ce temps, les bras croisés et quand il rentre dans ton champ de vision, tu le flingues d’un regard acéré. Tu le détestes. Vraiment. Tu aurais pu avoir une soirée confortable et tranquille, devant un film, pour te détendre et au lieu de ça, tu dois aller le ramasser ici. Est-ce que c’est sa faute ? Oui. Tu ne sais pas ce qu’il a fait exactement pour atterrir ici, mais tu te doutes que ce n’est pas pour avoir jeté des fleurs au visage de quelqu’un. « C’est la dernière fois. Aller, on rentre. »

Tu as dis ça aussi à l’ex-dernière fois, et encore avant celle-ci.

Que tu le fusilles du regard n’y changera rien. Dès lors que la clé avait déverrouillé la serrure de sa cage à poule, tu le vois s’enfuir de celle-ci comme un chien galeux de sa fourrière pour venir te déposer un bisou sur la joue. « Tss ! Casse-toi. Je préférais que tu me remercies en arrêtant de t’faire coffrer. » Sans le moindre ménagement, tu plaques ta main contre son visage et tu pousses pour le forcer à reprendre des distances convenables avec ta personne. « J’suis sérieux. C’est la dernière fois ! J’compte pas me ruiner éternellement pour ta sale tronche. » Moins nerveux, mais toujours avec autant de mordant dans la voix, tu ne comptes pas payer indéfiniment ses cautions. Tu ne manques pas d’argent (même si nous n’étalerons pas le comment, juste ; pirate, temporel maintenant qui plus est), mais tu aimerais pouvoir t’en servir plus intelligemment qu’en le chaperonnant. En achetant un nouveau bateau, par exemple.
À cet instant tu le détestes oui, mais plus les minutes passent et plus la pression retombe. Tu le regardes plus attentivement, toujours avec une moue renfrognée, et tu hausses un sourcil en voyant ses blessures. « Ok, mais juste parce que j’veux pas que tu foutes du sang partout. Et tu m’devras une faveur. »

Normalement tu es payée pour soigner autrui.
Ça reste ton colocataire, donc tu ne t’attends pas à ce qu’il te rémunère, mais c’est une façon de lui dire ouvertement que tôt ou tard, quand il voudra t’imposer une décision, tu remettras cette histoire sur le tapis pour le faire plier.

« Sauf si tu veux leur taper la bise, on rentre. » Sur ces mots, tu fais volte-face et tu ressors du commissariat sans demander ton reste. Vous vous êtes déjà fait suffisamment remarquer comme ça, tu ne juges pas utile d’en rajouter et de toutes façons, il doit être pressé de partir.
La route du retour se fait dans un silence pesant pendant une bonne poignée de minutes, avant que tu ne brises le silence ; « T’as fait quoi, cette fois ? » Il n’y a aucun fond de bienveillance. Du moins tu t’en convaincs. C’est plutôt de la curiosité, avec au tournant une évaluation. Tu ne vas pas te faire prier pour lui faire des reproches, si tu juges que ce chapitre de l’histoire est vraiment débile dans son exécution. Même si tu n’as plus d’équipage ou même le titre de capitaine, tu restes un pirate dans l’âme. Faire un tour en cellule, c’est une contrariété, mais pas une fatalité. D’autant que ça aide à réfléchir, de se faire mettre au fer.

Ce que tu n’avais pas prévu en revanche c’est que sur le chemin du retour, vous retombiez sur les petites frappes avec qui Kidd a gagné un séjour au fer. La fuite donc ; Pendant qu’il croupissait dans sa cellule, eux profitaient d’une espèce de victoire à la pyrrhus autour d’une bière bas de gamme sur les marches d’un escalier public.

Bien sûr ça, tu ne savais pas et donc, tu comptais passer ton chemin sans faire attention à eux. Rappelons une fois de plus que tu étais fatiguée, tu as fait ta journée et que trois heures s’étaient écoulées depuis la fin de ton service, donc que la nuit était bien avancée. Tu n’avais aucune attention de faire d’esclandre, tu voulais simplement retrouver ton lit. Après avoir soigné l’autre débile. « Tu prendras une douche aussi, s’te plait. » Lâches-tu dans le plus grand des calmes, te fichant éperdument de le traiter comme un gosse devant ces types, qui se mettent à glousser comme des hyènes en entendant ça. Tu roules les yeux vers le ciel, car tu t’attends à ce que ça ne se passe pas dans le calme.

Vengeance, fierté mal placée, revanche, etc…